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Espagne : Confrontation sanglante au pays basque
Dimanche 7 mai, un commando de l'ETA a abattu José Luis Lopez de Lacalle dans la ville de Andoain, dans la province basque de Guipuzcoa. Quatrième victime assassinée par l'ETA depuis la rupture de la trêve, José Luis Lopez était un collaborateur du quotidien espagnol El Mundo. Militant du Parti Communiste d'Espagne jusqu'en 1984, il était devenu très proche du PSOE. Plus récemment il était connu pour avoir été l'un des fondateurs du Forum d'Ermua qui s'était constitué en juillet 1997, après l'assassinat du conseiller municipal du Parti Populaire Miguel Angel Blanco, et qui regroupe des intellectuels hostiles au nationalisme basque. Opposé à tout type de négociations avec l'ETA, le Forum accusait notamment les deux partis nationalistes basques modérés, le PNV (Parti Nationaliste Basque) et EA (Eusko Alkartasuna-Solidarité Basque), d'être trop conciliants avec l'ETA.
Ce nouvel attentat se produit dans une situation marquée par les récents résultats des élections générales dans lesquelles le parti de droite au pouvoir à Madrid, le Parti Populaire, a progressé au Pays basque. Tandis que les partis dits espagnolistes essaient de casser les relations entre nationalistes modérés et l'ETA, l'ETA accentue sa pression sur les nationalistes modérés. Et si ces derniers ont à diverses reprises condamné la reprise des attentats, ils n'ont pas pour autant accepté - comme le voudraient les dirigeants des partis nationaux - de rompre tout lien avec l'organisation armée et son bras politique appelé Eusko Herritarok.
Au cours de ces derniers jours l'ETA a ainsi rendu publiques, dans le journal Gara, ses conversations secrètes avec le PNV et EA. Dans les documents que l'ETA présentait, elle rendait ces deux organisations modérées responsables de la rupture de la trêve en expliquant que leur refus de travailler à mettre en place un Parlement pour l'ensemble du Pays basque (Pays basque espagnol, Pays basque français et Navarre) freinait la construction de la nation basque. Par ailleurs, l'ETA a rendu public un document de l'été 1998 dans lequel le PNV et EA s'engageaient à s'orienter vers la création d'une " institution unique et souveraine " pour l'ensemble du Pays basque et à rompre tous ses liens avec le Parti Populaire et le PSOE.
Quatre jours avant l'attentat, le dirigeant de Eusko Herritarok, Otegi, affirmait qu'une nouvelle trêve serait possible si les partis nationalistes modérés négociaient une transition politique permettant d'aller plus loin que ne le permet la légalité en vigueur.
Le gouvernement autonome du Pays basque est, rappelons-le, dirigé par les deux partis modérés, le PNV et EA, qui n'ont pas à eux seuls la majorité et qui dépendent donc de l'appui de Eusko Herritarok, la coalition nationaliste radicale liée à ETA. C'est cette alliance que voudraient casser les dirigeants du Parti Populaire et du PSOE, qui font tout pour tenter d'imposer des élections anticipées en misant sur l'aggravation du recul des partis nationalistes basques et sur un changement d'alliance possible qui isolerait l'ETA. En s'en prenant pour la seconde fois à une personnalité proche du PSOE, l'ETA répond en voulant donner aux nationalistes modérés un clair avertissement sur les conséquences que pourrait avoir l'abandon du " front nationaliste " qui avait été défini par le Pacte de Lizarra. Mais il apparaît que, malgré les tensions et les pressions, jusqu'à présent aussi bien le PNV que EA continuent de se revendiquer du " bloc nationaliste " défini avec Eusko Herritarok ainsi que de la " construction nationale basque ". Mais il est aussi bien caractéristique que ces partis n'hésitent pas à s'appuyer sur les préjugés nationalistes, voire à les créer en rendant responsables les immigrants venus d'autres régions d'Espagne de la " perte de l'identité " du Pays basque, comme le dit le leader du PNV, Javier Arzalluz.
Ce type de déclarations et les actions terroristes de l'ETA contribuent en tout cas à creuser un fossé de plus en plus important au sein de la population basque et à accentuer l'antagonisme entre nationalistes et non nationalistes, au rang desquels on compte le PP et le PSOE qui, pour leur part, font de la défense de l'ordre constitutionnel leur cheval de bataille. Les uns et les autres cherchant avant tout à faire leur carrière politique en creusant les divisions et en attisant la haine entre les populations.