Remaniement : Fabius, la doublure de Strauss-Kahn31/03/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/03/une-1655.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Remaniement : Fabius, la doublure de Strauss-Kahn

En abandonnant le perchoir de l'Assemblée nationale pour le maroquin de l'Économie et des Finances dans le gouvernement de Jospin, Fabius réintègre un niveau de responsabilité dont il avait été écarté par l'affaire du sang contaminé. Le prix à payer est que cet ancien Premier ministre doit accepter de se placer sous les ordres de l'actuel Premier ministre, un cas de figure qui ne s'est pas produit, paraît-il, depuis 1966. Au moment de sa démission, Strauss-Kahn avait été salué chaleureusement par les milieux patronaux. L'arrivée de Fabius également. Le patronat connaît ses amis.

La carrière ministérielle de Fabius a commencé en 1981 au ministère du Budget. Il y fut l'auteur d'un impôt sur la fortune, peau de chagrin. En effet, ce fils d'un riche marchand de tableaux avait su en écarter les oeuvres d'art. Tandis que le gouvernement de gauche imposait le blocage des salaires, Fabius lança un budget dit de " rigueur " pour 1983. Devenu ministre de l'Industrie, cet élu de Haute-Normandie accorda au repreneur de la papeterie de La Chapelle-Darblay une aide de l'Etat d'un montant de 3,2 milliards de francs, dont 2,3 milliards d'aides directes.

En 1984, Fabius devenait, à 37 ans, le plus jeune Premier ministre en succédant à Pierre Mauroy, qui venait d'assurer le " sale boulot " en soutenant différents plans de licenciements notamment dans la sidérurgie. Il navigua alors entre l'affaire du sang contaminé et celle du Rainbow Warrior. Ces affaires et des oppositions internes au PS, notamment avec Jospin, l'enverront au perchoir de l'Assemblée dès 1988.

Blanchi dans l'affaire du sang contaminé, Fabius guettait son heure. Ces derniers mois, il a multiplié les déclarations à propos de la politique économique de Jospin. Ces remarques indiquent dans quelle direction il entend aller. En octobre dernier, on parlait beaucoup des stock-options, il prétend les rendre " transparentes " et les " étendre au-delà des dirigeants " d'entreprise. Le 2 février, il se dit pour " baisser fortement la taxe d'habitation " et même la " supprimer complètement ".

Le 4 mars, en écho aux critiques de la droite qui reproche à Jospin la hausse des prélèvements obligatoires, Fabius parle de " baisser réellement et rapidement les impôts. " Le lendemain il veut ramener les prélèvements obligatoires " à leur niveau de 1995 ". Le 7 mars, dans Les Echos, il chiffre la baisse des impôts à 170 milliards sur trois ans.

Ces baisses d'impôts peuvent être perçues comme bonnes à prendre, en réalité elles favoriseront ceux devant en payer le plus. Fabius a bien précisé qu'il est pour une baisse de " l'ensemble du barème ", y compris donc les hautes tranches qui se voient déjà sous la barre des 50 %. Ce n'est pas pour rien si les partisans du capitalisme le plus débridé, Madelin et d'autres, ne cessent de vanter la baisse d'impôts. Les projets de Fabius ne peuvent que convenir aux plus riches. Il serait plus intéressant pour les bas revenus que la TVA sur les produits diminue, à condition que cette baisse soit bien répercutée sur les prix.

Les idées de Fabius en matière de retraite ne sont pas plus encourageantes. En février dernier, il a dit qu'il restait partisan du système par répartition. Mais il plaide pour de nouvelles cessions " d'actifs aujourd'hui hypervalorisés comme France Télécom ou Thomson Multimédias ", donc de nouvelles privatisations pour alimenter le fonds de réserve sur les retraites. Il entend ouvrir la porte aux fonds de pensions et aimerait qu'" il y ait la possibilité de souscrire à ce que j'ai appelé des fonds de partenariat retraites [...] ouverts à tout le monde ". Il souhaiterait simplement " qu'obligation soit faite à ces fonds de pensions que 50 % de leurs avoirs soient investis en actions françaises ".

L'éditorialiste des pages boursières des Echos fait les yeux doux à Fabius : " Si (Fabius) réussit à mettre en pratique ses idées en matière de réduction des participations de l'Etat, de développement des stock-options ou de constitution de fonds de retraites investis en actions françaises, les entreprises, leurs actionnaires et leurs salariés seront gagnants ". Façon de dire que ce seront les classes riches qui trouveront leur compte si Fabius parvient à reprendre les projets que Strauss-Kahn avait préparés.

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