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- Lutte ouvrière n°1650
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Leur société
SMIC : Cinquante ans de salaire minimum pour une pauvreté maximum
Le salaire minimum, aujourd'hui le Smic, vient d'avoir 50 ans. Ce minimum appelé d'abord Smig, Salaire minimum interprofessionnel garanti, avait été institué en février 1950, à une époque dite de plein emploi. Il fixait un revenu minimum de base dans toutes les professions. Aucun salarié ne devait toucher de rémunération horaire en dessous de ce seuil.
Son taux était alors indexé sur le prix d'un " panier " de produits et de services censé correspondre aux besoins minimums d'un ouvrier célibataire de la région parisienne. Il était fixé par le gouvernement et ne changea guère jusqu'en 1968. Les grèves de mai 68 permirent d'arracher une hausse de 35 % d'un coup du Smig, mesure figurant dans les accords de Grenelle, signés entre patrons, syndicats et gouvernement.
Par cette hausse, bien des salariés (sans avoir été augmentés) se retrouvèrent au niveau du Smig. Celui-ci changea de nom en janvier 1970 pour devenir le Smic, Salaire minimum interprofessionnel de croissance, avec un mode de revalorisation modifié. Ce salaire n'était plus seulement indexé sur l'indice des prix (qui doit augmenter d'au moins 2 % pour entraîner une hausse annuelle du Smic, fixée au 1er juillet) mais également du pouvoir d'achat du salaire horaire moyen d'un ouvrier, afin d'éviter, disait ses promoteurs, un écart trop important entre le Smic et les autres salaires ouvriers (qui à l'époque augmentaient malgré tout un peu plus souvent qu'aujourd'hui, ne serait-ce que par le simple effet du marché du travail).
Depuis, le Smic a connu quelques " coups de pouce " du gouvernement, surtout liés au calendrier électoral, en 1981, 1985, 1990, 1995 et 1997. Rien de mirobolant puisque, aujourd'hui, il est fixé à 40,72 F brut de l'heure ou 6 881,68 F brut par mois ce qui correspond à un salaire net d'environ 5 400 F. 2,4 millions de salariés ne touchent que le Smic, plus particulièrement les ouvrières, dont 29 % sont payées au Smic.
Depuis sept ans, les gouvernements successifs ont multiplié les exonérations de charges sur les bas salaires et les contrats de travail à temps partiels, ce qui favorise le développement des emplois mal payés. Le nombre des salariés payés au Smic a d'ailleurs augmenté de 50 % en quatre ans !
Cela n'empêche pas le patronat de trouver l'existence du Smic trop contraignante encore. Il souhaiterait en tout cas que ce ne soit plus les gouvernements qui se chargent de le revaloriser (trop rarement pourtant) mais que cela soit le résultat d'une négociation patronat-syndicats. On imagine que cela ne serait pas pour pousser à la hausse !
Le Smic est loin d'être aujourd'hui le revenu minimum de tous les salariés. De nombreux travailleurs gagnent encore moins : les handicapés, les jeunes de moins de 18 ans, les apprentis, les salariés en contrats de qualification, etc. Mais il y a surtout la multiplication des contrats de travail à temps partiel, souvent imposés plutôt que choisis : les contrats CES (Contrat emploi solidarité) en sont un exemple dans la fonction publique où les salariés travaillent à mi-temps, en général pour un demi-Smic mensuel, sans pouvoir cumuler un deuxième emploi à côté. Et dans le privé, les contrats à temps partiel se sont généralisés.
Si bien que de nombreux travailleurs doivent se débrouiller avec des salaires de misère se situant entre le RMI (Revenu minimum d'insertion) à 2 502,30 F pour une personne seule et le Smic. Ce nombre de " salariés pauvres ", c'est-à-dire travaillant pour un salaire inférieur au Smic, s'élèverait à 3,2 millions (dont une majorité de femmes travaillant à temps partiel).
Voilà une réalité à mettre en rapport avec les profits boursiers qui ont été multipliés par deux en 1999 et affichent encore régulièrement de nouveaux records de hausse !