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- Lutte ouvrière n°1639
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Leur société
Le n°2 du PS en procès : L'argent n'a pas d'odeur... pour ces gens-là
Un dirigeant de parti politique gouvernemental passant en procès pour " recel et abus de biens sociaux ", cela peut sembler banal, bien que l'on imagine que les allées du pouvoir, présent ou passé, comptent une belle brochette de gens sur lesquels la justice pourrait encore se pencher.
Ce qui est moins banal, en revanche, ce sont les détails de l'affaire qui a amené en correctionnelle Jean-Christophe Cambadélis, numéro 2 du Parti Socialiste, secrétaire national de ce parti, en " congé " le temps de son procès.
Ayant perdu son siège de député en 1993, a-t-il dit aux juges, il se trouvait sans ressources et, comme il avait une famille à nourrir, il cherchait un emploi. Cela tombait bien, un certain Yves Laisné en avait un à lui proposer. Un emploi de " conseil " pas très prenant apparemment, puisqu'il ne supposait ni que Cambadélis ait un bureau à l'AFRP (Association des foyers de la région parisienne) de Laisné ni qu'il y passe ou y rencontre qui que ce soit.
Donc, pas vraiment un travail, mais un " emploi " rémunéré 20 000 F par mois. Dans le monde des affairistes et des politiciens, ce n'est pas mirifique, mais cela aurait sans doute paru formidable aux locataires immigrés de l'AFRP. D'autant plus que Cambadélis empocha dans les 460 000 F durant les deux ans où il était censé " conseiller " Laisné.
Des " conseils ", ce monsieur n'en avait guère besoin. En revanche, d'appuis bien introduits auprès du pouvoir, si. C'est avec le soutien du CNPF (l'ancêtre du MEDEF, le " syndicat " patronal) que Laisné s'était hissé à la tête de l'AFRP, une association regroupant une trentaine de foyers, ainsi que diverses sociétés de négoce (en Belgique, avec la Russie). Et les " affaires " de Laisné ne pouvaient prospérer qu'avec des appuis.
Cambadélis prétend qu'il ignorait ces choses-là. Pourtant, dès 1990, la presse avait rendu compte de rapports de l'Inspection des finances et de l'Inspection des affaires sociales mettant en cause la gestion du monsieur. Et si Cambadélis avait été un tant soit peu curieux, il serait allé ne serait-ce que dans un des foyers de l'AFRP (dont il était censé améliorer " l'image ") et aurait vu qu'on y faisait payer un " hébergement collectif dans des conditions contraires à la dignité humaine ", comme l'établira plus tard un tribunal. Mais pourquoi Cambadélis se serait-il inquiété ? Les sommes devant servir à la réfection des bâtiments hébergeant ces travailleurs immigrés dans des conditions révoltantes, Laisné s'en servait pour ses affaires (il laisse un trou de 63 millions de francs) ; il recevait des subventions du 1 % patronal, du FAS (Fonds d'action sociale), des Caisses d'allocations familiales, des organismes qui, apparemment, n'y trouvaient rien à redire non plus.
Cerise sur le gâteau, si l'on peut dire, Laisné était un ancien cadre du Front National et Cambadélis, qui fut un des fondateurs de Ras l'Front et a écrit un livre d'enquête sur le Font National, a cherché à convaincre les juges qu'il n'en savait rien !
Il est vrai que quand on ne veut rien voir, ni sentir, certains y arrivent. C'est même une des " qualités " exigées pour faire carrière dans le monde de la politique telle que la conçoivent les politiciens de la bourgeoisie, qu'ils soient de droite ou de gauche.
Et puis, vivre à ne rien faire sur le dos des travailleurs (immigrés, dans ce cas), c'est tellement dans les habitudes de la bourgeoisie, cela coïncide tellement avec les intérêts du monde que les politiciens défendent, que ceux-ci finissent même par trouver cela normal...