Le CDS et sa caisse noire : Le patronat arrose ses politiciens sans compter10/12/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/12/une-1639.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Le CDS et sa caisse noire : Le patronat arrose ses politiciens sans compter

Huit responsables du CDS, dont Pierre Méhaignerie, président de 1982 à 1994 de ce groupe de politiciens de droite qui a fourni des ministres, tel Jacques Barrot, à Balladur ou à Juppé dans les précédents gouvernements de droite, comparaissent en justice.

Dirigeants et trésoriers successifs du CDS sont donc poursuivis pour abus de confiance et recel. Normalement, les lois d'amnistie de 1989 et de 1992, que les politiciens se sont accordées, devaient leur permettre de mettre un terme aux pratiques antérieures de financement (ou, en gros, les principales grandes entreprises assuraient, sans trop de limites, la trésorerie des partis de droite et même de gauche par des modes de financement échappant à toute législation). Elles auraient dû protéger les politiciens du CDS.

Encore fallait-il ne pas se faire piéger par les limites mises par la loi. Ainsi, quand on déclenche une enquête en 1995, la loi de 1992 amnistie tout ce qui remonte au-delà de trois ans en arrière. Cela a suffi pour protéger l'ex-ministre des Finances de Juppé, Jean Arthuis. En revanche, un retrait de 150 000 F de l'un des accusés, effectué quelques jours après cette date de prescription, a suffi à mettre un ancien responsable du CDS, Froment-Meurice, sur la sellette.

Le plus fort est que cette enquête a été initiée par Méhaignerie lui-même quand il était garde des Sceaux entre 1993-1995. En bon démocrate-chrétien, il entendait ainsi faire la morale à ses adversaires. Il s'était cru très malin, mais à malin, malin-et-demi, le voilà poursuivi par sa propre faute, parce qu'il n'a pas su compter... jusqu'à trois.

Pour le reste, on trouve les habituelles ficelles de toutes ces affaires de financement. Les gros sous des chefs d'entreprise (volés aux travailleurs), les comptes en Suisse, les intermédiaires, les chefs de parti très au courant qui jouent les saints innocents.

Dans cette affaire, il y a les 5 millions versés par un entrepreneur, Jacques Mallard, en échange d'un permis de construire.

Normalement, le versement de 5 millions aurait dû être amnistié, mais Mallart a étalé les versements au-delà de la date de prescription de cette affaire. Or, en l'absence de document écrit (on s'en passe fort bien dans ce genre de transactions), c'est la date de versement qui compte.

Et comme toujours, les uns et les autres tentent de repasser la patate chaude à un éventuel bouc-émissaire. Ainsi, Méhaignerie, Barrot et les autres aimeraient bien que Froment-Meurice assume tout ce qui cloche. Lui, de son côté, essaye de minimiser ses responsabilités. Il jure ne rien savoir du compte en Suisse destiné à alimenter le CDS, mais indique au passage que Bouygues a versé de l'argent au CDS au moment de la construction du pont de l'île de Ré et que son patron, Méhaignerie, qui feint aujourd'hui de tout ignorer, était très informé de l'essentiel des transactions, surtout quand il s'agissait de grosses sommes. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien qu'en 1990, Méhaignerie avait ordonné la destruction des registres comptables (occultes) du CDS.

La justice porte aujourd'hui un coup à la droite. Demain, ce sera le tour de politiciens du Parti Socialiste d'être mis en cause. C'est sa façon de maintenir l'équilibre entre les différents partis dont la bourgeoisie peut avoir besoin, aussi bien au niveau des finances que pour la sélection des futurs députés et ministres. Quelques politiciens usés mis au rancart dans les affaires, cela fait de la place pour les jeunes loups qui ont encore leurs dents à faire.

En attendant, tout cela indique que le patronat regorge d'argent mais que cet argent, qui échappe à tout contrôle, sert à peu près à tout sauf à mettre en oeuvre des choses utiles pour la population. Les patrons préfèrent s'en servir, entre autres, pour que les politiciens, aux différents niveaux, leur mangent dans la main.

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