Leïla Sebbar évoque dans ce court roman la manifestation du 17 octobre 1961 à Paris des Algériens qui protestaient contre l'instauration du couvre-feu. La répression de la police de Maurice Papon, alors préfet de Paris, fut féroce. Près de 12000 travailleurs algériens furent internés à Coubertin ou au Palais des Sports. A ces arrestations massives s'ajoutèrent les assassinats. Les agents de police tirèrent sur les manifestants, boulevard Bonne-Nouvelle et ailleurs, les poursuivirent dans tout Paris et en jetèrent dans la Seine pieds et poings liés. Le lendemain la " Seine était rouge " du sang des Algériens assassinés.

Mais, dans la presse, ce fut le silence quasi total. Quant aux organisations ouvrières, elles restèrent muettes, tout au plus la CGT et le PCF lancèrent des pétitions. C'est ce silence que dénonce Amel, le personnage principal. Elle n'a que 16 ans et n'a donc pas vécu cette époque. Mais sa mère l'a vécue. Amel voudrait qu'elle lui raconte, mais la mère d'Amel et sa grand-mère aussi sont restées muettes durant toutes ces années sur ces événements vécus alors qu'elles habitaient les bidonvilles de Nanterre. C'est pour un ami qui réalise un documentaire sur le 17 octobre qu'elle acceptera de raconter cette nuit-là. Amel cherche de son côté tout de même à reconstituer les événements en parcourant les quartiers de Paris où ses parents, comme des milliers d'autres, manifestèrent, en cherchant à retrouver des témoins.

Leïla Sebbar a écrit ce roman pour la jeunesse, mais les adultes peuvent tout aussi bien le lire. Les occasions d'évoquer cette manifestation ne sont pas si nombreuses, même pas loin de 40 ans après.

Aline RETESSEE

La Seine était rouge de Leïla Sebbar - Editions Thierry Magnier 43F, 138 pages.