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- Lutte ouvrière n°1629
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Dans les entreprises
Nos lecteurs nous écrivent - Gibert Jeune - Paris : Des kilomètres de livres... ou le poids des maux
Gibert, fondée il y a plus d'un siècle, c'est l'histoire d'un libraire peut-être un peu plus " malin " que les autres, qui a su profiter d'une aubaine républicaine : l'éducation pour tous...
L'idée ? Vendre des livres dont les élèves ont besoin. La librairie les rachète de 5 à 55% du prix neuf, et les revend d'occasion de 40 à 85% du prix neuf. Les marges de profit atteignent jusqu'à 88% ! Un système qui a de quoi faire briller les longues dents de la famille Gibert.
Mais après avoir acheté des magasins sur la place Saint-Michel, et bénéficié d'une croissance jusqu'en 1993, les chiffres d'affaires ont stagné et le groupe a freiné sa progression.
En 1998, une série de désaccords sur la restructuration de l'entreprise ont amené le patron à licencier sa directrice commerciale et sa propre fille (alors directrice adjointe). Les licenciements ayant été jugés abusifs par les Prud-hommes, l'entreprise a été condamnée à verser un total de 1 600 000 F d'indemnités. L'appel porterait l'indemnité de la fille à 2 700 000 F.
Les procès pour licenciements abusifs, irrégularités, les amendes répétées pour vice de sécurité dans les magasins sont courants. Les salaires sont bloqués depuis des années. Une prime " étrenne ", 70% du 13ème mois, a été diminuée de moitié, voire supprimée pour certains. Il y a une vingtaine d'années les salariés s'étaient battus pour l'obtenir, déclenchant un mouvement de grève qui s'était étalé sur trois mois. Gibert avait fini par céder. Des oublis constants sont constatés sur les bulletins de salaires : primes de remplacement non versées, dépassements horaires non payés pour les caissières. Des postes supprimés sur les rayons sont au mieux remplacés par des CDD lors des périodes fortes.
Les conditions de travail sont innommables dans certains magasins envahis de cafards. En plein été, dans un de ceux-ci, on dépasse facilement les 30° car le site n'est pas climatisé. Les employés y souffrent de maux de tête, de toux. Il faut dire que le magasin ouvre ses portes toute la journée sur un boulevard saturé de voitures et que rien ne ventile cet air pollué. En hiver, c'est pire, la vieille chaudière n'arrive pas à réchauffer l'air glacé qui y pénètre. Et pour couronner le tout, on y voit même des souris.
C'est dire que les motifs de mécontentement sont nombreux et le ras-le-bol des salariés amplement justifié, face aux méthodes abusives et au dédain d'une direction avide de profit.