États-Unis : la classe ouvrière a besoin de son propre parti17/09/20162016Lutte de Classe/medias/mensuelnumero/images/2016/09/178.jpg.484x700_q85_box-0%2C0%2C1383%2C2000_crop_detail.jpg

États-Unis : la classe ouvrière a besoin de son propre parti

Nous publions ci-dessous la traduction de deux articles de la revue trotskyste américaine Class Struggle (n° 90, août-septembre 2016). Ce premier texte concerne la situation actuelle, à la veille de l’élection présidentielle américaine, et les efforts de militants du Michigan pour y constituer un parti ouvrier. Quand cet article a été publié aux États-Unis, le 31 juillet, ces militants avaient collecté plus de 50 000 signatures pour être légalement reconnus comme parti politique, aux termes de la loi électorale du Michigan. Ils ne savaient pas alors si les autorités valideraient un nombre suffisant de signatures légalement requis (31 566) pour cette reconnaissance. C’est maintenant officiel : lors des élections du 8 novembre 2016, les électeurs du Michigan pourront voter pour des candidats du Parti de la classe ouvrière (Working Class Party). L’effort militant de pétition a donc été fructueux. Nos lecteurs anglophones peuvent suivre leur campagne sur le site https://www.workingclassfight.com. Le second article porte plus spécifiquement sur l’histoire des tentatives de construction d’un parti ouvrier.

L’un des candidats à la présidence, Donald Trump, a lancé de violentes attaques contre les immigrés, il a attisé les animosités raciales, a nourri le feu des peurs xénophobes contre les musulmans et les « étrangers », a joué sur un mépris profondément ancré des femmes… et il a ensuite osé se présenter comme un ami, un combattant pour « les gens qui ne peuvent pas se défendre eux-mêmes ». Ce n’est pas un ami, ce multimilliardaire qui a accumulé sa fortune en exploitant les travailleurs partout où il est allé.

L’autre candidat, Hillary Clinton, a osé se présenter comme celle qui « nous rassemblera tous », affirmant qu’elle s’emploiera à créer des emplois et à augmenter les salaires. Pourquoi devrait-on croire quelqu’un qui s’est employé pendant des décennies à mener des politiques favorables aux grosses banques multinationales, quelqu’un qui a contribué à diriger les guerres des États-Unis, qui ont dévasté d’autres pays en aspirant l’argent des villes américaines et de l’éducation ? Est-ce que le tigre perd ses rayures lorsqu’il chasse sa proie ?

C’est un spectacle écœurant que de regarder ces deux-là rivaliser pour la présidence, chacun prétendant être du côté des gens ordinaires.

Mais ils ne le sont pas. Ce sont des représentants des classes riches. Ils travaillent directement à déplacer plus d’argent vers les coffres des grandes banques, des grandes entreprises, de l’immobilier, de l’agrobusiness ou de ces spéculateurs méprisables de Wall Street.

Leurs deux partis, les démocrates et les républicains, ne représentent pas les travailleurs. Aucun parti ne le fait aujourd’hui. Et c’est précisément le problème : tandis que la classe capitaliste dispose de deux partis pour la représenter et défendre ses intérêts, la classe ouvrière n’en a pas.

Nous qui travaillons chaque jour pour vivre, personne ne nous représente. Aucun parti ne parle pour nous, aucun parti qui dise cette vérité de base que nous sommes une classe, une classe qui peut avoir le pouvoir si elle est unie, une classe qui perd beaucoup de sa force si elle est divisée.

Les deux grands partis cherchent à nous diviser, à nous dresser les uns contre les autres. Et c’est peut-être le plus grand service que ces deux candidats rendent à la classe capitaliste : ils parlent, agissent et manœuvrent pour affaiblir la classe ouvrière.

Il faut un parti des travailleurs

Mais nous appartenons à la même classe – Noirs, Blancs, Latinos et tout autre qui doit travailler chaque jour juste pour vivre – hommes, femmes et enfants. Nous sommes une classe, nous avons nos intérêts et ils sont distincts et séparés de ceux des autres classes.

Nous avons besoin de notre propre parti. Mais il n’existe pas. C’est le problème auquel nous sommes confrontés et c’est un problème depuis longtemps. La classe ouvrière a besoin de son propre parti, un parti comptant des centaines de milliers de gens, prêts à mener la bataille.

Nous construirons ce parti, un vrai parti, exactement de la même façon que les travailleurs ont, à un moment, construit des syndicats de masse pour eux-mêmes – des syndicats que la classe capitaliste s’est battue pour empêcher ou pour rendre illégaux. Quoi que ces syndicats soient devenus, il faut nous souvenir de la manière dont nos prédécesseurs les ont obtenus. Il y a plus de quatre-vingts ans, les travailleurs se sont battus pour des augmentations de salaire, ils se sont battus contre la faim, contre la police qui attaquait les piquets de grève, arrêtait ou tuait les militants.

A travers ces luttes, ces travailleurs construisirent leurs propres organisations.

Nous construirons un parti de la classe ouvrière de la même façon. Un parti ouvrier digne de ce nom apparaîtra au travers des luttes des travailleurs, luttes pour lesquelles la classe ouvrière se mobilisera pour imposer ses propres solutions aux problèmes de la société.

Aujourd’hui la classe ouvrière ne se bat pas – tout du moins pas au niveau nécessaire pour prendre son destin en main. Mais des gens se battent bien ici ou là, des gens qui parfois essaient d’étendre leurs luttes à d’autres travailleurs.

Dans le Michigan

Et il y a des gens qui essaient de pénétrer dans l’arène politique – au moins dans le Michigan.

En 2014, cinq personnes se sont présentées comme candidats indépendants, en demandant aux gens de voter pour eux, pour montrer leur accord avec l’idée que les travailleurs devaient s’organiser de façon indépendante. Ils disaient alors que la classe ouvrière ne peut se défendre qu’en menant une lutte collective.

Il n’y eut que cinq candidats, dans seulement un État, mais il y eut un résultat : 17 000 personnes exprimèrent leur accord avec eux à travers leur vote. Cette campagne de 2014 a ouvert une voie qu’il fallait suivre.

Ces cinq candidats, et ceux qui se sont organisés autour de cette campagne de 2014, ont essayé de s’appuyer dessus pour 2016. Ils ont fait le travail nécessaire pour présenter un parti politique dans tout l’État du Michigan. Ils ont obtenu les signatures de plus de 50 000 personnes, dont la plupart ont signé pour montrer leur accord avec l’idée principale de cette campagne, c’est-à-dire que les travailleurs ont besoin de leur propre parti, un parti représentant leur classe.

Pour que la base de classe de ce parti soit bien claire, il fut appelé le Parti de la classe ouvrière (Working Class Party).

50 000 signatures devraient être plus que suffisantes, mais rien n’est garanti. L’Etat du Michigan n’a semble-t-il pas encore statué et il peut y avoir des embûches le long de la route. Mais, quoi qu’il arrive, quelque chose d’important a déjà été fait : une campagne a été  menée dans les quartiers ouvriers, dans les centres commerciaux, les lieux de travail, les parcs et les fêtes locales. Au moins 50 000 personnes – et sans doute plus – ont débattu de ce problème, à savoir que les travailleurs ont besoin de leur propre parti.

Si le Parti de la classe ouvrière peut effectivement se présenter, cela ne signifie pas que les travailleurs auront construit un vrai parti. Mais son nom sur le bulletin de vote est une façon de planter un drapeau, de dire qu’il y a besoin d’un parti de la classe ouvrière.

Toute personne qui est d’accord qu’il manque un tel parti peut le dire en votant pour des candidats enregistrés au nom du Parti de la classe ouvrière, exactement comme des dizaines de milliers ont déjà exprimé leur accord en signant la pétition pour le nouveau parti.

En novembre, les travailleurs du Michigan devraient pouvoir dire avec leur vote ce qu’ils veulent vraiment : un parti pour leur classe.

31 juillet 2016

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