Un échange de correspondance entre Lutte Ouvrière et la LCR01/05/20022002Lutte de Classe/medias/mensuelnumero/images/2002/05/65.png.484x700_q85_box-6%2C0%2C588%2C842_crop_detail.jpg

Un échange de correspondance entre Lutte Ouvrière et la LCR

La lettre de la Ligue Communiste Révolutionnaire

Montreuil, le 29 avril 2002

Chères et chers camarades,

Comme nous l'avions convenu, nous vous proposons de vous rencontrer demain mardi 30 avril dans la journée. Notre comité central qui s'est tenu dimanche a confirmé les propositions que nous vous avions faites lors de notre première réunion exploratoire, à savoir :

une répartition des circonscriptions 50 % - 50 % au niveau national et dans chaque département, avec appel au vote réciproque, sur la base d'une déclaration commune fixant les enjeux de cette élection ;

d'inclure dans cet accord comme partenaires les cadres locaux qui s'inscriraient dans cette démarche nationale. En tous les cas, nous nous efforcerons en ce qui nous concerne d'ouvrir notre campagne et nos candidats à ceux et celles qui ont participé et se sont reconnus dans la campagne présidentielle que nous avons menée ;

en ce qui concerne le deuxième tour des législatives, chaque organisation gardera ses modalités d'expression propre dans le droit fil de ce que chacun de nos candidats a développé lors de la présidentielle. Partout où le risque existe, nous pensons que nous ne devons pas prendre le moindre risque de favoriser l'élection de députés fascistes notamment en cas de triangulaires et appeler dans ces cas à voter pour le candidat de gauche le mieux placé au premier tour.

En l'attente d'un contact téléphonique pour fixer l'heure de notre rencontre, nous vous adressons, chères et chers camarades, nos salutations révolutionnaires.

Léonce Aguirre et François Sabado.

La réponse de Lutte Ouvrière

Paris, le 6 mai 2002

Chers camarades,

Le plébiscite triomphal pour Chirac complète de la pire façon la politique du gouvernement de la gauche plurielle.

Alors que les résultats du premier tour de l'élection présidentielle montraient clairement que Le Pen serait très nettement battu par les seules voix de la droite, l'ensemble de la gauche s'est employée à gonfler la baudruche Le Pen et, au nom d'un combat contre une prétendue menace fasciste, s'est prostituée gratuitement vis-à-vis de Chirac.

De la part des dirigeants de la gauche, c'était un choix délibéré pour éviter toute discussion sur la cause de la perte de 2 488 078 voix pour Jospin et 1 672 456 voix pour Hue, c'est-à-dire une perte totale de 4 160 534 voix.

En brandissant la menace de l'élection de Le Pen à la présidence de la République, dont ils savaient parfaitement que cela ne pouvait pas se produire dans le contexte d'aujourd'hui, en évoquant un danger fasciste inexistant, les partis de gauche, d'une part, ont cherché à faire oublier le recul du nombre de voix des classes populaires qui se sont portées sur eux et, d'autre part, ont transformé leur propre recul en avancée de Le Pen.

Mais il a suffi de leur pression pour que vous cédiez, bien que vous ayez réussi à ne pas évoquer le nom de Chirac ! Vous avez pris une résolution à double ou à triple lecture pour satisfaire chacune de vos tendances. Par opportunisme, par adaptation au milieu qui vous entoure, vous avez rejoint l'union sacrée autour de Chirac. Et l'appel hypocrite à manifester le soir du 5 mai pour, croyez-vous, vous laver les mains du vote de la journée n'y change rien.

Votre contribution à l'élection de Chirac n'a été que dérisoire et, indépendamment de votre appel, une grande partie de l'électorat d'extrême gauche, même sans vous, aurait sans doute cédé à la pression pour le vote Chirac. Mais le fait est que, dans une situation qui exigeait de dire la vérité aux classes populaires, que l'on soit écouté ou pas, vous avez fait le choix de leur mentir, à l'instar des Hollande, Hue, Mamère et compagnie. Vous avez apporté votre minuscule caution au vote pour Chirac en le présentant malgré vos dénégations comme un moyen de barrer la route à Le Pen.

Vous comprendrez que, dans ces conditions, nous ne donnerons pas suite à votre proposition qui impliquerait au moins un certain accord politique. Et nous ne souhaitons pas cautionner une attitude aussi opportuniste que la vôtre.

Quant à vos alliés car l'accord est supposé s'étendre à d'autres que vous-mêmes , n'en parlons même pas ! Vous n'êtes même pas certains de les convaincre de participer à un accord LO-LCR.

Il n'est donc pas question de faire croire que nos politiques respectives sont voisines alors qu'elles sont à l'opposé.

Tout en vous posant comme les militants de l'unité à l'extrême gauche contre ce que vous appelez le " sectarisme " de Lutte Ouvrière un mot que vous n'avez cessé de répéter pendant la campagne, alors que, dans le contexte créé par les calomnies contre nous, cela prenait une consonance particulière votre proposition était de toute façon une proposition hypocrite. Dans de nombreux endroits en effet, des responsables de votre organisation, y compris parmi les plus représentatifs, ont déjà désigné des candidats de la LCR aux législatives. Dans certains cas, il y a des candidats annoncés dans toutes les circonscriptions d'un département, alors que vous nous parliez d'une répartition par département.

Quel crédit accorder à une proposition de répartition lorsque, de toute évidence, vous avez commencé à choisir ?

Alors, autant que chacune défende sa propre politique et que la signification des votes soit claire !

Avec nos salutations révolutionnaires.

François DUBURG et Georges KALDY

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