La situation politique intérieure22/12/19801980Lutte de Classe/medias/mensuelnumero/images/1980/12/81.jpg.484x700_q85_box-27%2C0%2C2451%2C3504_crop_detail.jpg

La situation politique intérieure

La situation générale du pays reste dominée par la crise économique internationale.

En France cette crise se traduit par une baisse relative de la part globale des salaires dans le revenu national. Le nombre de chômeurs ne cesse d'augmenter : environ 1500 000 selon les chiffres officiels, plus de deux millions selon la CGT. Depuis la modification des conditions d'indemnisation des chômeurs, la catégorie des chômeurs qui ne sont plus du tout indemnisés augmente vite : 300 000 en août, 500 000 aujourd'hui. Parallèlement la généralisation du travail temporaire et des contrats à durée limitée accentue la précarité de l'emploi. Cependant ce chômage qui affecte principalement les jeunes et les femmes est encore globalement assez bien supporté sauf dans quelques régions plus précisément atteintes par les restructurations, les fermetures d'usines, les faillites (sidérurgie lorraine, textiles du Nord, Saint-Etienne, etc). Mais là encore différents systèmes de pré-retraite permettent de limiter ou d'adoucir les licenciements.

Par ailleurs l'inflation augmente : plus de 14 % dans l'année selon l'indice officiel. Mais les salaires suivent encore à peu près, quoique toujours avec du retard. D'autre part toute une série de mesures visant soi-disant à combler le déficit de la Sécurité Sociale ont contribué à rogner un peu les ressources des salariés et des retraités (1 % d'augmentation de la retenue sur les salaires, prélèvement d'office sur les retraites, etc). Les conséquences de ces grignotages ne sont pas négligeables mais pour les salariés en activité, la baisse relative du pouvoir d'achat n'apparaît pas dramatique.

Elle n'a entraîné en tout cas aucune réaction d'envergure. Seuls quelques secteurs particulièrement mal payés de la classe ouvrière ont lutté, avec un relatif succès, pour une augmentation de leur salaire : les nettoyeurs du métro, et après eux, ceux des gares et d'autres grandes entreprises, les poseurs de rails du TGV, etc. Mais dans aucun des grands secteurs concentrés de la classe ouvrière, il n'y a eu de luttes offensives sur le plan des salaires (ni dans l'automobile, ni dans la chimie, ni dans la sidérurgie, ni dans les télécommunications).

Les travailleurs n'ont vraiment réagi que dans certains des secteurs où ils se sentaient attaqués. C'est ainsi que l'on a assisté à une riposte quasi unanime des électriciens quand on a parlé de limiter leur droit de grève. Et que la grande journée de protestation contre le projet gouvernemental de remanier la Sécurité Sociale a mobilisé des centaines de milliers de gens. Mais encore une fois, il s'est agi à chaque fois de ripostes limitées et démonstratives, à des attaques gouvernementales.

L'absence de riposte syndicale généralisée

Bien entendu, ni la CGT, ni la CFDT, ni a fortiori FO, ne proposent à la classe ouvrière un plan de contre-offensive générale contre la politique du patronat et du gouvernement. Mais de toute façon, à aucun moment, on n'a vu les travailleurs prêts à déborder les syndicats.

Selon toute apparence, une mentalité répandue dans la classe ouvrière est qu'il faut éviter de faire des vagues, qu'il faut se cramponner à son travail sans ajouter par des revendications intempestives, aux difficultés que traversent les entreprises. Et cela même dans les entreprises qui marchent bien (Renault par exemple). Cette mentalité « conservatrice » est exploitée par les staliniens sur le plan politique. Cela devient là où les entreprises vont mal « maintien de l'emploi », « maintien en activité des entreprises », « non au démantèlement », « non à la privatisation », « non à la casse », etc.

Ce type de lutte est parfaitement illustré par la bagarre menée par le PCF à propos de Manufrance. Manufrance (comme en son temps « Le Parisien Libéré » ) est devenu presque un symbole. Une épreuve de force y est engagée entre le PCF et le gouvernement, dont on ne sait d'ailleurs pas si ce ne sont pas les travailleurs qui en feront les frais. La municipalité communiste de Saint-Etienne s'est retrouvée en 1977 actionnaire de l'entreprise en difficulté, et a tenté de démontrer que « Manu pouvait vivre » et qu'une bonne gestion assortie de quelques aides patronales ou gouvernementales conjurerait la faillite annoncée.

Le PCF en fait une affaire politique visant à démontrer qu'il n'y a pas de crise mais une volonté du patronat et du gouvernement de casser les entreprises et de soumettre l'économie française aux intérêts américains-allemands ! Avec un autre gouvernement, entend-il démontrer, on pourrait empêcher la « casse ». Mais c'est évidemment faux. Un gouvernement de gauche avec participation communiste ne ferait pas mieux que Barre ou Giscard, il n'aurait aucun moyen d'obliger les capitalistes à investir là où cela n'est pas rentable et en période de crise, il ne pourrait même pas utiliser l'argent des contribuables pour sauver « les canards boiteux » de l'économie. Les grandes puissances de la finance qui tiennent les commandes véritables du pouvoir s'y opposeraient. Elles ont besoin d'un État qui les serve, elles, entièrement, surtout en temps de crise.

Cela le PCF le sait bien. Mais en bonne organisation réformiste, il ne peut que défendre l'idée qu'une autre politique, avec un autre gouvernement, pourrait sortir le pays de la crise. D'où ses affirmations répétées que la crise est due à la volonté de ce gouvernement de casser l'industrie nationale.

Des calculs électoralistes sont aussi présents dans les intentions du gouvernement en cette période de crise et d'élections. Certes le gouvernement réserve ses subventions et avantages aux grands groupes du nucléaire, des télécommunications et de la chimie, mais il tient aussi à s'assurer la confiance et l'approbation de la petite bourgeoisie. Par toute une série de mesures (liberté des prix, dégrèvement d'impôts, dégrèvement des charges sociales, etc.) il a permis dans un premier temps à la petite bourgeoisie de traverser la crise sans en souffrir. En 1978, c'est visiblement le vote de l'électorat centriste (on peut dire essentiellement petit-bourgeois) qui, en restant acquis à la majorité, a permis la défaite de la gauche. Cet électorat fait depuis l'objet de maintes faveurs gouvernementales ; même si cela coûte à l'État un certain manque à gagner. C'est le prix attaché par la majorité, et plus particulièrement par Giscard, à sa réélection.

Pourtant à long terme, ces mesures ne mettront pas la petite bourgeoisie complètement à l'abri de la crise et de la restriction du marché due à la baisse du pouvoir d'achat des travailleurs. Mais ces effets-là ne sont pas encore très visibles aujourd'hui, si l'on met à part quelques régions particulièrement touchées par le chômage comme la Lorraine.

Au plan économique et social, l'année aura donc été marquée par une relative stabilité malgré l'aggravation de la situation de la classe ouvrière, et les restructurations et modernisations intervenues au niveau des grands groupes (sidérurgie, automobile) capitalistes.

Il est évident que la crainte de perdre son emploi, l'incertitude du lendemain jointe au fait que les indemnisations de chômage parviennent encore à faire vivre - plutôt mal que bien - les familles de chômeurs, jouent dans le sens d'une certaine résignation et d'une stabilité sociale. Mais cette résignation craintive peut tout aussi bien faire place à la colère et au désespoir si les conditions s'aggravaient brutalement.

Déjà les présidentielles

Sur le plan politique, la situation reste toujours marquée par la défaite électorale de la gauche en 1978 et la préparation des présidentielles de 1981.

La droite giscardienne s'est très bien remise de l'heureuse surprise de 1978. Par contre le RPR, et en particulier Chirac qui préparait une option plus dure, susceptible de succéder à un Giscard déconsidéré par sa collaboration forcée avec Mitterrand, s'est retrouvé dans le vide. Partagé entre le désir d'apparaître critique vis-à-vis de Giscard pour bien marquer les différences et la nécessité de soutenir le gouvernement, la ligne du RPR a oscillé entre les dénonciations tonitruantes et les silences bien ou mai calculés. Chirac en paie aujourd'hui le prix avec la candidature Debré qui est avant tout une machine de guerre contre lui et celle de Marie-France Garaud, son ancienne conseillère en mal de héros à soutenir.

Tout cela profite à Giscard qui bénéficie en outre d'une certaine prime à celui qui est au pouvoir en place et qui passe pour assurer la stabilité sociale.

Dans les rangs de la gauche officielle les répercussions de l'échec de 1978 continuent à se manifester. Le PCF est entré dans un cours sectaire et radical, marqué par un révolutionnarisme de parole et un rapprochement spectaculaire avec Moscou. Ce nouveau cours, ébauché pour l'essentiel dès l'été 1977 est une réaction contre la politique unitaire (1973-1977) qui avait profité spectaculairement au PS ressuscité et qui avait conduit à un léger affaiblissement de l'audience électorale du PC. C'est pour ne plus tirer les marrons du feu pour le PS, pour ne pas se voir évincé à plus ou moins brève échéance d'un gouvernement de gauche issu des élections de 1978, que délibérément le PCF avait sabordé l'Union de la gauche, fruit de tant de veilles et d'efforts antérieurs. En sabordant l'Union de la gauche, il sabordait du même coup les chances - mais existaient-elles réellement ? - d'une victoire de la gauche unie aux élections. Il préférait que la gauche n'aille pas au gouvernement plutôt que de risquer que le PS y aille sans lui.

Depuis, tout le problème du PCF se résume à cette interrogation simple : comment faire pour contraindre le PS à collaborer avec le PC au gouvernement ? Un programme commun, dûment signé ne suffit pas. Il lui faut d'autres garanties et en particulier celle que sa représentation au gouvernement et au Parlement corresponde réellement à son poids dans le pays. Il lui faut donc commencer par faire sentir son poids. Poids électoral d'abord, bien sûr, et pour cela regagner les quelques voix perdues au profit du PS. Il s'agit surtout de ne pas recommencer l'erreur de 1974, en appelant les électeurs du PCF à voter pour un candidat PS. Aussi le PC a-t-il, bien avant tout le monde, désigné son candidat et annoncé la couleur : il faut un PC fort, pas une voix perdue, même le « désistement automatique » est jugé périmé. Le PC menace de s'abstenir au deuxième tour, s'il ne vient pas en tête de la gauche, car il ne veut absolument pas que ses voix, les voix des électeurs communistes aillent gratuitement au PS, gratuitement, c'est-à-dire sans âpres marchandages, sans garantie, sans contrepartie. (Et pour bien montrer qu'il ne plaisante pas, le PCF aux récentes sénatoriales, a demandé aux grands électeurs communistes de ne pas voter pour le PS dans sept circonscriptions car le PS avait refusé un accord de premier tour favorable au PC dans une seule circonscription, celle des Côtes-du-Nord).

La contrepartie exigée par le PC est, on peut s'en douter, un accord lui consacrant pour l'avenir (les législatives de 1983 par exemple) un certain nombre de sièges. Électoralement le PS n'est pas très loin devant le PC, mais le mode de scrutin majoritaire peut traduire ce léger avantage en une énorme avance au niveau des sièges. Nous en avons vu un bel exemple avec les élections américaines où Reagan avec 10 % de voix de plus que Carter a obtenu 489 grands électeurs contre 49 à Carter, c'est-à-dire dix fois plus. Pour obliger, tout le temps d'une législature, le PS à tenir compte des députés du PC, encore faut-il que ces députés soient nombreux, qu'ils constituent pour le PS un allié indispensable et permanent, et non un allié circonstanciel que l'on pourra envoyer par-dessus bord au premier coup de barre.

Le nouveau cours du PCF

Il lui faut aussi faire sentir son poids sur le plan social. D'où un langage radical, des déclarations fracassantes, « nous sommes un parti révolutionnaire », une réactivation de la presse d'usine, une participation aux différentes campagnes (contre le projet de remaniement de la Sécurité Sociale, Manufrance, produire français, etc.) un combat pour les radios libres, et une mobilisation importante de ses effectifs.

Mais c'est surtout par l'intermédiaire de la CGT que le PCF intervient et agit. La CGT se montre de loin le syndicat le plus actif même s'il tourne parfois à vide. Au sectarisme anti-PS sur le plan politique, correspond sur le plan syndical un sectarisme anti-CFDT manifeste. Ce n'est pas seulement la concurrence entre les deux centrales (cf. la grève des nettoyeurs du métro, celle des marins pêcheurs de Boulogne) qui explique ce nouveau cours. C'est l'application d'une ligne politique qui vise à ce que les militants cégétistes et communistes (ce sont souvent les mêmes) se montrent, interviennent, fassent sentir leurs forces. La CGT est un élément de poids dans la gué-guerre PC-PS. Le PS au gouvernement, seul, pourrait voir la CGT se dresser contre lui, une CGT dont le PC essaie de démontrer aujourd'hui qu'elle n'est pas en perte de vitesse.

La CGT peut apparaître combative d'autant plus aisément qu'à ses côtés, les autres syndicats ne font aucune surenchère.

L'interventionnisme tous azimuts de la CGT est aussi un moyen de regagner du terrain perdu. Terrain électoral, mais aussi terrain tout court, car si la CGT est combative, si on la voit partout, si elle parle plus haut que les autres, entraînant d'ailleurs parfois les autres, elle avoue dans ses réunions de responsables et ses congrès par branches qu'elle traverse de grandes difficultés de recrutement et de trésorerie. A plusieurs reprises elle aurait ainsi annoncé qu'elle se verrait contrainte de licencier plusieurs de ses permanents si les cotisations de ses membres anciens et nouveaux ne sauvaient pas la situation. Il est évidemment impossible de savoir quelle est la part du bluff et du chantage dans ces déclarations, mais il n'est pas invraisemblable qu'elles révèlent des difficultés réelles.

Ce sont en tout cas des problèmes de cet ordre qui peuvent seuls expliquer le rapprochement du PCF avec Moscou. En allant en personne en URSS, en faisant depuis Moscou une déclaration favorable à l'intervention russe en Afghanistan, Georges Marchais a spectaculairement mis fin à un mouvement amorcé il y a quelques années, et qui marquait une discrète tendance à l'éloignement. Rien dans le cours sectaire et radical du PCF ne l'obligeait à approuver l'intervention russe en Afghanistan. Mais on peut comprendre qu'un PCF isolé, risquant de voir se détourner de lui un certain nombre de militants et de sympathisants formés dans le cours unitaire, recherche d'autres appuis, et - il est permis de le penser - d'autres subsides.

Ce rapprochement, joint au radicalisme et au sectarisme est incontestablement bien accueilli par une partie des militants du PCF, ceux qui précisément n'avaient pas accepté l'effacement de leur parti devant Mitterrand en 1974. En cultivant la mentalité : « nous sommes dans une forteresse assiégée... la cible de toutes les attaques anticommunistes ... On nous attaque parce qu'on nous redoute... C'est la preuve que nous avons raison », le PCF essaie, et apparemment avec un certain succès, de limiter les dégâts. En contrepartie bien sûr, il perd un certain nombre de militants en désaccord avec le cours actuel, il les perd ou il les incite à partir, en approuvant l'exclusion ou la mise à l'écart de certains membres en vue. Cela fait partie de la logique de son fonctionnement.

Les contradictions du ps

Pour le PS aussi les répercussions de la défaite électorale de 1978 sont loin d'être terminées. Le cours violemment anti-PS du PC place Mitterrand dans une impasse. Mitterrand, et derrière lui le PS, avait fondé sa stratégie de retour au gouvernement sur une union électorale avec le PCF, qui devait lui servir de marchepied. Cette union est rompue. Pour la remettre sur pied, le PS n'est pas prêt à payer le prix qu'en exige le PCF car le programme commun de gouvernement était évidemment un marché de dupes qui ne liait que les électeurs du PCF et non Mitterrand lui-même. Il pouvait très bien, au bout de quelque temps, congédier les ministres PCF, si même il en admettait dans le gouvernement. En homme de la bourgeoisie Mitterrand veut pouvoir se passer des communistes. La défaite de la gauche et le cours actuel du PC le placent dans une situation bien gênante, d'autant qu'elles favorisent les visées de son rival le plus direct, Rocard, partisan avoué lui d'une plus grande indépendance vis-à-vis du PC.

Ce n'est pas qu'il ait une politique fondamentalement différente de celle de Mitterrand, mais il dit dès maintenant, lui, ce que Mitterrand s'apprêtait à faire sans le dire au lendemain des élections. Dans ces conditions Mitterrand a hésité à se porter candidat, car un échec spectaculaire nuirait à sa position même à l'intérieur du parti.

A l'extrême-gauche enfin, et plus particulièrement à la LCR et à l'OCI, on ne se remet pas de l'échec de l'Union de la gauche. Plus de trois ans après l'été de la rupture ces deux groupes trotskystes en sont encore à réclamer l'unité. L'unité « pour les luttes » bien sûr, et sans les Radicaux de gauche, mais l'unité quand même, ce qui en période électorale, quel que soit l'emballage, ne peut signifier que pacte électoral PC-PS. L'OCI fait campagne pour une candidature unique de la gauche dès le premier tour, la LCR a un candidat, Alain Krivine, qui se présente comme le candidat du désistement automatique et de l'unité ouvrière. Quelles que soient les formes, il est évident aujourd'hui que réclamer l'unité à tout prix - une unité qui ne peut être favorable qu'au PS et dont le PC pour cette même raison ne veut pas - c'est une façon de choisir son camp dans la querelle PC-PS, et de se ranger avec armes et bagages derrière le PS.

C'est pourquoi, bien que nous ayons en juin dernier discuté un temps d'une éventuelle candidature commune, aucun accord n'a pu être possible avec la LCR, et il ne peut être question aujourd'hui pour nous de faire la moindre concession pour parvenir à une candidature commune que rien, politiquement ou matériellement, ne justifie. Nous participerons donc à la campagne sur nos bases : défiance vis-à-vis du PS et du PC, confiance dans la force des travailleurs mobilisés.

Les possibilités des révolutionnaires

Nous allons consacrer toutes les forces nécessaires à notre participation à la campagne mais il faut savoir qu'il s'agit d'une simple activité propagandiste et qu'un parti révolutionnaire ne peut se créer uniquement en participant à la vie politique par l'intermédiaire des élections.

Pour un petit groupe, les possibilités d'intervention dans la vie politique sont évidemment rares, mais elles existent.

Sur un terrain qui n'est pas directement politique (les transports en commun) mais qui est un terrain de masse, nous nous sommes préparés à deux reprises à l'automne 1979 et à l'été 1980, à intervenir à la tête d'un mouvement de masse contre l'augmentation des tarifs. Ce mouvement n'a pas eu lieu, notre propagande en faveur de la grève du paiement n'a rencontré qu'une audience très limitée, et nous avons dû restreindre nos ambitions en constituant et en animant une association de consommateurs. Mais nous avons essayé de faire ce qui dépendait de nous.

Très récemment, après les attentats antisémites et la bombe de la rue Copernic, nous nous sommes posé la question d'intervenir directement. Comment ? En proposant, au nom des travailleurs révolutionnaires, d'assurer la protection des lieux publics juifs et des hôtels et cafés musulmans, en demandant l'aide de la population, des jeunes Juifs et des jeunes Musulmans bien sûr, mais aussi de tous ceux, par exemple motards, jeunes travailleurs, cibistes, ou encore population habitant à côté des lieux visés, pour assurer ensemble la surveillance jours et nuits. Cela aurait été une façon concrète de démontrer à la population ou àune partie d'entre elle, que l'on pouvait se défendre soi-même, se passer des policiers et de l'appareil de répression douteux de l'État, que l'on pouvait s'organiser, créer des structures populaires efficaces et responsables. Pour ce travail d'organisation, demandant une exceptionnelle disponibilité et des qualités de sérieux, de sang-froid, d'organisation et de jugement politique, nous n'étions pas assez nombreux, nous ne faisions pas le poids. La tâche nous dépassait. De très loin ? Non, probablement pas, mais d'assez loin pour que nous ne puissions pas nous lancer dans une telle intervention sans risquer d'aboutir à l'effet contraire, à démontrer notre inefficacité en faisant perdre toute confiance dans le sérieux des révolutionnaires.

Sinon, si nous ne parvenons pas à nous hisser a ce niveau, nous resterons un groupe propagandiste, et avec le temps, nous finirons par ne plus être même un groupe révolutionnaire.

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