La crise de l'économie capitaliste22/12/19801980Lutte de Classe/medias/mensuelnumero/images/1980/12/81.jpg.484x700_q85_box-27%2C0%2C2451%2C3504_crop_detail.jpg

La crise de l'économie capitaliste

La situation internationale était marquée l'année écoulée par la continuation de la crise économique, d'une part ; par une certaine détérioration des rapports entre les États-Unis et l'Union Soviétique, de l'autre.

La crise économique n'a toujours pas pris une forme cataclysmique. Elle demeure pour l'essentiel la crise du système monétaire international. Elle continue à se manifester sous la forme d'une inflation générale, de flambées spéculatives sur l'or, sur certaines monnaies, sur des valeurs boursières ; et par le renchérissement du prix du pétrole.

L'absence d'un système monétaire international à peu près stable continue à peser sur le commerce international. Mais, bien qu'elle dure maintenant depuis une dizaine d'années, le commerce international n'en a pas été affecté au point d'entraîner un effondrement de la production.

Depuis 1974 - seule année depuis le début de la crise où la production mondiale était franchement en recul - seul le rythme d'accroissement de la production était ralenti. La diminution notable de la production industrielle dans quelques-uns des pays capitalistes les plus puissants - aux États-Unis en particulier - annonce cependant que 1980 pourrait avoir été, de nouveau, une année de stagnation, voire de recul de la production.

L'interdépendance inextricable des économies nationales dans le déroulement même de la production, plus encore que l'étroitesse des marchés nationaux comme débouchés pour les produits finis, fait que la sauvegarde d'un commerce international intense demeure une nécessité vitale pour l'économie capitaliste. Les États tentent de concilier cette nécessité-là avec celle, dans une large mesure contradictoire, de protéger leurs propres groupes capitalistes face à la concurrence des autres - concurrence d'autant plus acharnée que l'expansion du marché mondial se ralentit.

La simple protection du marché national n'y suffit pas - encore que tous les États pratiquent un protectionnisme multiforme plus ou moins déguisé derrière des réglementations administratives ou des manipulations de leur monnaie nationale. Les États sont entièrement au service des plus puissants de leurs monopoles capitalistes afin de les aider à améliorer leurs positions sur les marchés internationaux. (Subventions, aides à l'exportation, engagement direct des États dans la conclusion de contrats commerciaux internationaux, etc.) L'aspect de plus en plus visiblement mercantile des déplacements diplomatiques des chefs d'État comme des ministres est plus qu'un symbole : c'est une manifestation de la subordination de la diplomatie aux intérêts extérieurs privés de quelques grands trusts.

En cette période de pessimisme pour l'avenir économique, les commentateurs et les thuriféraires de l'économie bourgeoise ont l'air d'avoir besoin d'exhiber des « miracles ». En l'occurrence, les « miracles économiques » allemand et japonais.

Il faut d'abord rappeler que si la bourgeoisie allemande et la bourgeoisie japonaise ont réussi à maintenir, voire à renforcer leurs positions malgré la crise, ce n'est pas seulement grâce au dynamisme ou à la créativité de leurs hommes d'affaires, et certainement pas parce qu'ils auraient trouvé un remède miracle contre la crise. L'une comme l'autre continuent à bénéficier d'avantages acquis au détriment notamment de la bourgeoisie américaine, au temps où l'État de cette dernière était occupé par la guerre du Vietnam. C'est en particulier en jouant sur leurs monnaies contre un dollar déjà malade mais non encore dévalué qu'ils ont commencé à conquérir des positions sur le marché américain.

Jusqu'à présent, et parce que la crise n'est pas encore grave, elles ont pu maintenir, voire renforcer leurs positions. mais l'évolution de la crise est déjà en train de ternir le « miracle » allemand, la situation de l'allemagne commençant à se dégrader cette année.

Quant à la bourgeoisie japonaise, la compétitivité de sa production par rapport à certains de ses rivaux impérialistes repose pour une large part sur une exploitation plus forte des travailleurs, obtenue notamment par un encadrement et une discipline quasi-militaires, imposée à la classe ouvrière.

Le Japon est, de toutes les puissances impérialistes, une de celles dont l'économie est la plus dépendante du commerce international et de ses aléas, pour ses approvisionnements comme pour ses ventes. Une montée du protectionnisme dans le monde aurait pour le Japon des conséquences catastrophiques.

Pour maintenir le taux de profit - menacé du simple fait que l'expansion du marché n'a pas le même dynamisme qu'avant la crise - la bourgeoisie s'est déjà sérieusement attaquée au niveau de vie de la classe ouvrière, y compris dans les pays impérialistes riches. L'accroissement incessant du chômage depuis le début de la crise est un phénomène général dans l'ensemble de l'économie capitaliste. Il s'est encore aggravé en 1980. Sous les effets convergents de la pression du chômage, de l'inflation, et de mesures étatiques, la part globale de la classe ouvrière diminue dans tous les revenus nationaux.

Rien ne permet de parler plus que les années précédentes de l'imminence d'un effondrement économique brutal. L'économie capitaliste continue à tourner, bien que l'effondrement puisse intervenir à n'importe quel moment. Elle le fait au prix d'une dégradation incessante de la condition ouvrière. La diminution du pouvoir d'achat de la classe ouvrière finit à son tour par freiner l'extension du marché des biens de consommation et contribue de la sorte à freiner la production.

Les conséquences de la crise, même sous sa forme limitée actuelle, sont plus graves encore pour les exploités des pays qui participent aux échanges mondiaux en position subordonnée par rapport aux puissances impérialistes.

Les deux manifestations les plus tangibles de l'inflation mondiale, la hausse du prix des produits industriels et celle du pétrole, poussent les pays sous-développés non producteurs de pétrole eux-mêmes vers la faillite. Même pour ceux qui disposent de matières premières commercialisables en contrepartie de ces produits industriels ou du pétrole - ce qui est loin d'être le cas de tous - la crise aggrave encore les termes du change. Les trusts qui contrôlent ou qui achètent ces matières premières, engagés eux-mêmes dans une lutte plus féroce pour sauvegarder ou pour accroître leurs profits, font une pression plus forte pour limiter les prix qu'ils paient. Le ralentissement de l'expansion de la production, en affaiblissant la demande de matières premières, pèse encore sur les prix.

Les pays de l'Est qui avaient fortement accru leurs échanges avec l'Occident afin de participer un peu plus à la division internationale du travail, notamment avec les pays développés à la technologie avancée, participent également aux relations économiques internationales en position subordonnée par rapport à l'impérialisme. Plus ils participent au marché mondial - et il s'agit surtout des Démocraties Populaires - plus leurs États sont amenés à répercuter à leur façon la crise et la pression accrue de l'impérialisme sur les masses populaires de leur pays. Pour tenter de maintenir leurs importations, ou plus simplement pour payer leurs dettes accumulées au cours des années précédentes à l'égard des banques occidentales, les Démocraties Populaires mènent des politiques économiques caractérisées par des efforts accrus pour au moins maintenir les exportations, c'est-à-dire par une forte pression pour restreindre la consommation populaire. La diminution de niveau de vie de la classe ouvrière contre laquelle se sont soulevés les travailleurs polonais, est un fait général à toutes les Démocraties Populaires.

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