La campagne et les résultats de la LCR01/04/19861986Lutte de Classe/medias/mensuelnumero/images/1986/04/121.jpg.484x700_q85_box-27%2C0%2C2451%2C3504_crop_detail.jpg

La campagne et les résultats de la LCR

La Ligue Communiste Révolutionnaire a finalement présenté vingt listes aux élections législatives, aucune aux élections régionales. Mais le moins que l'on puisse dire est que cela a été sans enthousiasme et à contre-cœur, et en le reconnaissant même ouvertement.

Cette façon d'entrer en campagne explique sans doute, au moins en partie, l'allure de celle-ci : la Ligue a donné l'impression de n'être jamais vraiment convaincue ni qu'elle avait des raisons de présenter des candidats, ni qu'elle avait des choses à dire, ni qu'elle savait vraiment à qui elle entendait s'adresser. Et cela explique, en partie aussi du moins, la minceur des scores de la LCR, y compris en comparaison avec ceux des autres formations de l'extrême-gauche, puisqu'elle ne fait en général que la moitié ou le tiers des voix du MPPT, et le quart ou le cinquième de celles de Lutte Ouvrière. Et pourtant toutes les formations d'extrême-gauche, sans exceptions, ne font elles-mêmes que des scores très faibles.

Un autre symptôme du même malaise est le fait que la LCR ait consacré une partie de sa campagne à polémiquer contre Lutte Ouvrière, à qui elle reprochait de n'avoir pas accepté de faire des listes communes. Non seulement dans son hebdomadaire, mais dans ses meetings, ses tracts et ses conférences de presse, partout elle a cru bon de consacrer une place ou un moment pour attaquer le prétendu sectarisme de Lutte Ouvrière ou s'en plaindre. Ce n'est pas là seulement un curieux thème électoral. C'est aussi l'indication que, au moment où les révolutionnaires devaient chercher à s'adresser à la masse des électeurs et des travailleurs, et que l'occasion leur en était donnée, la LCR n'avait pas pour préoccupation première de parler aux travailleurs de leurs problèmes, ou pire peut-être pas grand'chose à dire sur ceux-ci.

Tout cela n'est que le reflet d'un échec de la politique générale de la LCR. Elle a cherché à mettre sur pied un rassemblement qui irait de Lutte Ouvrière aux écologistes, en passant par tout ce qui reste des différents courants issus de Mai 68. C'est ce qu'elle a appelé « l'alternative anticapitaliste ». Mais ce rassemblement ne s'est pas produit. Et d'abord parce qu'il était contre nature. Ainsi la plupart des écologistes ont refusé l'alliance avec la LCR. Comme elle le reconnaît volontiers elle-même, sans se soucier des contradictions entre ses propositions et ses analyses, les « verts » ne sont pas et ne se prétendent pas anticapitalistes. Comment se soucieraient-ils de construire une « alternative anticapitaliste » ?

Lutte Ouvrière pour sa part, on le sait, n'entendait nullement participer à un rassemblement de gens qui se veulent peut-être, sur tel ou tel point, écologie, antiracisme ou féminisme, à la gauche de la gauche, mais qui ne sont, et ne prétendent pas d'ailleurs être, ni révolutionnaires ni partie du mouvement ouvrier.

Le résultat c'est que « l'alternative anticapitaliste », d'après les recensements de la LCR elle-même, n'a pu présenter que dix-neuf listes aux régionales, et douze aux législatives (et là, dans quelques cas, en concurrence avec les propres listes de la LCR).

Les quelques exemples de professions de foi des listes alternatives que nous donnons dans ce dossier - et il s'agit là de listes soutenues par la LCR ou dans lesquelles elle avait des représentants - illustrent parfaitement ce que nous pouvions dire à propos de ce rassemblement de l'alternative. Sans être toutes aussi caricaturales que celle de l'Hérault, qui est pour l'essentiel une défense des vignerons occitans, elles sont toutes l'émanation de gens qui se placent sur le terrain du régionalisme, de l'écologie ou de l'anti-racisme, mais jamais sur celui de la lutte de classe et du mouvement révolutionnaire prolétarien.

Certes, la LCR a aussi dit ici ou là des choses très semblables à ce que disait Lutte Ouvrière. Elle a aussi tenté de s'adresser aux travailleurs. A notre avis, ce fut bien souvent dans la forme comme dans le fond avec des différences sensibles, dans la façon de parler de la droite et de la gauche, et de faire des différences ou pas entre elles, par exemple. Mais nos lecteurs pourront juger eux-mêmes à la lecture des documents que nous donnons dans ce numéro de la Lutte de Classe.

Mais, justement, les multiples facettes de la politique de la LCR, régionaliste dans l'Hérault et en Bretagne, lutte de classe dans la Seine-Saint-Denis, écologiste et humaniste à Paris, révolutionnaire prolétarienne dans l'Essonne, ne peuvent qu'entraîner la confusion, confusion des électeurs, confusion aussi des militants.

Les résultats électoraux ne sont certes pas le seul critère, et encore moins le principal, pour juger de la politique d'un groupe révolutionnaire. Mais l'échec sur tous les plans, non seulement sur celui des résultats, mais aussi sur celui de la campagne elle-même, de la LCR est tout de même significatif de l'impasse dans laquelle sa politique actuelle pousse cette organisation.

Rédaction de « Lutte de Classe »

Doublez à gauche ! article paru dans Rouge n°1191, 9-15/1/86)

A gauche ? Vous avez dit à gauche ? Mais qui est encore à gauche dans cette campagne électorale ?

Mitterrand ? Allons donc ! Dans ses vœux de fin d'année, il s'est surtout efforcé de faire oublier qu'il fut, voilà cinq ans, l'élu d'une majorité de travailleurs. Pour lui, la cohabitation avec la droite, au soir du 16 mars prochain, n'est pas un problème : « Quoi qu'il en soit (du verdict des urnes), des lois sont votées, des décrets sont pris, d'autres le seront, des instructions sont données au fil des ans et d'autres viendront. Il faut poursuivre la tâche sans faiblesse. La France continue, l'État aussi. »

Fabius ? Il s'empresse de démentir. Le « socialisme moderne » qu'il appelle de ses souhaits est un mélange des valeurs de la droite et de la gauche. Dans une interview au Monde du 7 janvier, il exaltait ainsi de « larges zones de consentement » et plus particulièrement le mariage de « l'économique et du social » , de « l'individuel et du collectif » , de « la sécurité et du risque » , des « grandes réformes » et d' « une bonne gestion » .

Jospin ? Il ne veut plus se reconnaître que dans l'étiquette « social-démocrate ». Interrogé sur Radio Monte-Carlo, le 5 janvier, il confiait : « Si devenir un parti social-démocrate c'est devenir la social-démocratie suédoise, faire 40 % des voix, alors je veux bien me fixer cet objectif. » A lire ce plat éloge du réalisme gestionnaire des partis frères du nord de l'Europe, on mesure le chemin parcouru depuis l'époque où le premier des socialistes menait campagne en affirmant : « Le PS se tourne vers les Français pour leur dire : vous n'êtes pas désarmés devant une crise dont vous devinez qu'elle n'a pas éclaté par hasard : ce sont les privilégiés dans notre pays qui tendent à accréditer cette idée, parce qu'ils ne veulent surtout pas mettre en cause leurs privilèges, ni la stratégie des puissances qui garantissent à leurs yeux la pérennité de l'ordre établi, c'est-à-dire leurs propres intérêts de classe. » (le Projet socialiste, page 17).

Marchais ? Il voudrait bien le faire croire. C'est pourquoi il ne cesse de fustiger la complicité du PS et de la droite. Mais comment oublier que, lorsqu'ils y trouvaient leur intérêt, les dirigeants communistes n'étaient pas trop regardants sur la politique du gouvernement auquel ils collaboraient ? Et surtout comment ne pas voir que les rodomontades du secrétaire général n'ont pour unique objectif que de couvrir l'impuissance du PCF à proposer une quelconque issue à l'échéance de mars ?

Décidément, plus on se rapproche du scrutin, moins on trouve de forces ayant conservé cette boussole qui indique résolument la gauche. Il est vrai que pour ceux qui nous gouvernent, cette notion est « usée », comme l'expliquait récemment le chef de l'État. Et pourtant, être à gauche, ce n'est rien de plus qu'offrir au monde du travail une véritable alternative politique, un projet s'opposant sur tous les plans à la société de l'exploitation et des inégalités. Être à gauche, c'est avant tout dire trois fois non !

TROIS FOIS NON !

Non au retour d'une droite revancharde . Chirac, Giscard, Barre, c'est la réaction sur toute la ligne. Leur programme pue le fric, quelles que soient leurs précautions de langage. Et ce n'est pas la dernière opération de Hersant qui nous démentira. Pour ces gens-là, une seule chose compte : que les puissants soient toujours plus puissants. Même s'il faut, pour y parvenir, tailler à la hache dans les acquis sociaux, rogner les libertés, bafouer la plus élémentaire justice. Le passé de collabo du patron du Figaro, les diatribes anti-ouvrières et anti-immigrés de ses plumitifs montrent que, pour cette droite gorgée de haine, Le Pen et son Front national ne sont pas des passagers clandestins. Ce sont des amis de la famille.

Non à une gauche qui a tout renié. Sous couvert de « modernisation », le gouvernement - formé désormais du seul PS, après avoir réuni les deux grands partis ouvriers - a sacrifié jusqu'à ses propres références aux exigences des possédants. Sa seule loi est celle du profit. Son seul idéal c'est la survie du capitalisme. Sa seule morale, c'est la soumission à la France du fric et des privilèges. Comme s'il voulait en administrer une nouvelle preuve, il vient d'ailleurs de convoquer une session extraordinaire du Parlement afin de faire passer son projet scélérat sur la flexibilité du travail. L'Assemblée rose de 1981 achève son mandat par la destruction d'une conquête datant du Front populaire. Rien de moins !

Non au bradage des revendications et des valeurs ouvrières. Face à la crise mondiale de leur système, les capitalistes n'ont pour seule politique qu'un libéralisme sauvage inspiré par Reagan et Thatcher. A l'inverse, les travailleurs n'ont d'autre choix que de résister pied à pied, d'opposer à l'adversaire la défense intransigeante des revendications, des acquis, des intérêts ouvriers, de préparer les conditions de leur mobilisation unitaire.

Tant pis si les adeptes de François de Closets ou d'Edmond Maire ne voient que ringardisme dans ces quelques principes. Laissons-les aux chimères d'une société où patrons et salariés collaboreraient harmonieusement, en dépit d'intérêts totalement opposés.

Pour nous, s'il est une idée moderne, c'est bien celle du socialisme. Car la crise actuelle montre que le capitalisme est incapable de fonctionner dans le sens du progrès social. Dans ces conditions, pourquoi chercher à concilier l'inconciliable ? Pourquoi hésiter à rompre avec la loi du marché ? Pourquoi refuser de sortir d'un système dont la faillite plonge des millions d'êtres humains dans la détresse et le dénuement ?

Aujourd'hui comme hier, il faut afficher la couleur. Être à gauche, c'est être rouge, c'est mettre l'intérêt des travailleurs et de la population laborieuse avant toute autre considération. Voilà le message que nous voulons faire passer dans les prochaines semaines, à l'encontre des discours prônant la résignation. Voilà pourquoi aussi nous avons choisi comme thème de campagne « Voyez rouge ! ».

SOCIALISME ET PROFITS COHABITATION IMPOSSIBLE !

« Voir rouge » en 1986, ce n'est pas égrener quelques formules toutes faites. C'est démontrer la nécessité d'une politique au service des travailleurs. Une politique qui s'incarne dans les exigences ouvrières et populaires les plus urgentes : contre l'austérité, pour la défense de l'emploi et des salaires, contre le racisme, pour l'égalité des droits entre Français et immigrés, contre le nucléaire et la force de frappe tricolore, pour la solidarité internationale avec les peuples en lutte, etc.

Ce message, nous aurions voulu le défendre avec le maximum de forces et de militants se situant à la gauche de la gauche officielle. Hélas, cela n'a pas été possible, le regroupement d'une alternative anticapitaliste commençant à peine à se cristalliser. Et nous nous sommes heurtés au sectarisme de diverses organisations, à commencer par Lutte Ouvrière qui a refusé toute campagne commune avec la LCR.

Il n'y aura donc, en mars prochain, que quelques listes anticapitalistes larges, dans le cadre des législatives ou dans celui des régionales. Pour que ses propositions aient un écho national, la LCR a donc décidé de présenter vingt listes aux législatives.

La carte que nous publions en pages 8 et 9 fournit une indication des départements où nous mènerons cette bataille, qu'il s'agisse de candidatures LCR ou de regroupements unitaires que nous soutenons. Nous reviendrons la semaine prochaine plus largement sur les listes de la LCR. Mais dès cette semaine, nous établissons un premier recensement des processus unitaires en cours, recensement que nous compléterons au fur et à mesure que les informations nous parviendront.

Il n'y a plus un instant à perdre pour qu'une autre voix se fasse entendre dans cette campagne. Dès aujourd'hui, les militants et sympathisants de la LCR vont consacrer toute leur énergie à cet objectif.

Christian Picquet

fs28 semaine du 30 janvier au 5 février

Le 16 mars, voyez rouge !

Ça y est ! Ils se souviennent. Le PS vient de se rappeler que les travailleurs avaient voté pour lui en mai 1981, et aux législatives qui suivirent la victoire de Mitterrand. Et comme les dirigeants socialistes prennent l'électorat ouvrier pour un moineau sans tête, ils pensent qu'il leur pardonnera, dans le secret de l'isoloir, d'avoir fait le « sale boulot » dont Fabius se vantait récemment à la télé.

UTILE, LE VOTE PS ?

Franchement, vous ne croyez pas que c'est un peu gros, qu'ils se fichent de nous, au PS ? Ils ont gouverné contre nous, pour le patronat, et maintenant ils se déguisent en « gauche-dernier-rempart-contre-la droite » pour espérer nos suffrages. L'austérité de Fabius, commencée sous Mauroy et avec l'appui du PC, s'inspire de celle de Barre. La politique de Mitterrand cherche à rivaliser avec celle de Giscard. Alors, cinq ans ont passé, et puis, comme à confesse, on pardonne et on revote pour eux ?

Bien sûr, la même rengaine revient : votez utile... Utile, le PS ? Oui, pour faire passer la pilule des licenciements et de la baisse des salaires sans trop de grèves. Utile, le PS, pour nous travailleurs ? Demandez donc à ceux de la navale, de la sidérurgie, du charbon, pour ne prendre que ceux-là, si le PS leur a servi à autre chose qu'à se faire licencier vite fait bien fait. Demandez aux jeunes, à qui Fabius donne des TUC pour tout futur, s'ils portent le pouvoir dans leur cœur.

La grande gauche, le Parti Socialiste, c'est l'austérité repeinte en rose, c'est une gauche qui n'a pas d'arguments contre la droite parce qu'elle lui a repris une bonne partie de sa politique.

La petite gauche, le Parti Communiste, est toute honteuse d'avoir pratiqué au gouvernement en compagnie du PS cette politique contre les travailleurs. Elle en rajoute maintenant, pour faire oublier sa responsabilité. Et finalement, le PCF ne propose rien d'autre pour l'avenir qu'une nouvelle Union de la gauche rééquilibrée en faveur de Marchais. Quel crédit accorder aujourd'hui au PCF ? Non seulement pour ce qu'il a fait mais aussi pour ce qu'il propose.

VOTEZ ROUGE

La Ligue Communiste Révolutionnaire présente vingt listes aux législatives et soutient des listes unitaires dans d'autres départements tant aux régionales qu'aux législatives.

La LCR avait proposé à Lutte Ouvrière un accord national, mais LO pense que l'heure est plutôt à cultiver les différences que peser pour rassembler.

Alors, le 16 mars, votez LCR ou pour les listes soutenues par elle.

C'est le seul vote qui permet de dire à la fois qu'on est clairement contre le retour de Le Pen et contre l'austérité du PS et du PCF. C'est le seul vote qui se prononce pour une politique au service des travailleurs, fondée uniquement sur la satisfaction des besoins collectifs et des aspirations du plus grand nombre.

C'est éviter les calculs politicards et la démagogie électorale.

fs28 (extraits d'un article paru dans Rouge n°1195, 6-12/2/86)

« Pourquoi viens-tu si tard ? » La question est mi-curieuse, mi-goguenarde. On la pose souvent, ces derniers temps aux militants de la section lyonnaise de la LCR, dernière organisation politique à présenter sa liste. Elle a pris, en effet, le risque, le temps et les moyens, de jouer le jeu de l'unité, de concert avec d'autres forces politiques locales. Elle a tenté de rassembler, avant de se présenter seule, devant les électeurs.

Appelons un chat, un chat : le panorama lyonnais à gauche est plutôt sombre. Face à la droite - Barre et le RPR Michel Noir - on trouve Hernu-Greenpeace et Fiterman, qui se fixe des objectifs limités. Tout cela risque peu d'attirer un électorat potentiel conséquent « à gauche de la gauche ». LO, le MPPT-Socialisme maintenu et les Verts présentent in fine leur propre liste. Ceux qui refusent la politique des frères ennemis de la gauche depuis 1981, en seront donc réduits à faire le choix entre quatre candidats. En dehors de son profil politique particulier, la LCR reste aussi la seule liste des quatre a avoir tenté de limiter les dégâts.

« Le jeu en valait la chandelle », estime Jean-Michel, sa tête de liste. Dès l'automne, la LCR, le PSU, la Fédération de la gauche alternative, importante à Lyon et le Parti pour une alternative communiste entamaient une bataille conjointe en s'adressant aux Verts, afin de constituer une liste unique.

La démarche intéressait des militants de nombreuses associations locales. Les premières rencontres se tenaient en novembre. Elles créaient une pratique de rassemblement et de confrontation salutaire dans la seconde agglomération du pays. L'emploi, la lutte des peuples des DOM-TOM, le combat contre l'extrême-droite, réunissaient beaucoup de monde. Mi-janvier, un appel pour les élections, la rédaction d'une plate-forme : la démarche unitaire largement avancée butait toujours sur le sectarisme des Verts. Le PSU et la FGA se retiraient de la bataille.

« Mais cette démarche de rassemblement reste un acquis positif. Quelque chose a commencé à bouger » , commente Jean-Michel, un quelque chose qui aurait pu se concrétiser pendant la campagne par des initiatives communes. A propos de l'emploi, par exemple. Les 7e et 8e arrondissements de Lyon constituent aussi un pôle industriel. La LCR et les autres forces y sont enracinées. Les menaces de licenciements sont monnaie courante dans la métallurgie à Paris-Rhône ou Videocolor. A propos de la santé, l'hôpital Edouard Herriot a été l'un des piliers de la grève nationale des manipulateurs radio, à laquelle les militants de la Ligue ont largement participé.

Un comité de soutien à la liste s'est constitué, regroupant de nombreux sympathisants des entreprises concernées. Un autre est en place au sud de Lyon : Feyzin, Saint-Fons, Pierre-Bénite..., dans des municipalités tenues par le PS ou le PC. La LCR développe ses arguments et thèmes de campagne, autour de la chimie notamment, activité industrielle décisive dans la région (...)

fs28 (20-26/2)

Le 16 mars, votez contre l'austérité

« Je veux récolter ce que j'ai semé à gauche » , telle est la nouvelle affiche du Parti Socialiste. « Ce que j'ai semé à gauche » , c'est un bulletin de vote le 10 mai 1981, dont a bénéficié Mitterrand, pour en finir, disait-il, avec le chômage et l'inflation. Eh bien, c'est la gauche qui nous a semés, et la récolte n'est bonne que pour les patrons.

QUI SÈME L'AUSTÉRITÉ RÉCOLTE LA DROITE

La moisson est amère. Dans la dernière ligne droite avant le 16 mars, la gauche assène deux nouveaux coups aux travailleurs. Le premier, c'est la loi sur la flexibilité. Sous couvert de temps choisi, il s'agit de faire travailler plus et n'importe quand pour un salaire inférieur, sans embaucher. Évidemment, cette loi est tout bénéfice pour les patrons, Le second coup est insidieux, racial, discriminatoire, une espèce d'apartheid rampant. Fin décembre 1985, la Caisse nationale d'allocations familiales prive les travailleurs étrangers venus d'Afrique, et seulement eux (ceux de la CEE ne sont pas touchés) des allocations familiales s'ils sont au chômage ou en préretraite. La droite avance dans son programme commun ce genre de mesures qu'elle a elle-même repris à Le Pen !

Jusqu'à l'extrême fin de son mandat, la gauche inflige l'austérité aux travailleurs. Le 16 mars, on ne peut pas, à moins d'aimer souffrir, voter pour cette gauche-là, qui a semé la graine de l'austérité qui germe maintenant pour être récoltée par la droite. Voter PS, le 16 mars, c'est voter contre soi, pour que l'austérité continue.

Ce que la LCR n'a cessé d'opposer aux plans d'austérité des gouvernements de gauche, ce sont des mesures d'urgence, exclusivement favorables aux travailleurs. Bien sûr, pour les obtenir, il faut s'en prendre aux capitalistes. Mais on ne peut en finir avec le chômage et l'inflation sans s'en prendre aux puissances de l'argent.

VOTEZ POUR LES INFLEXIBLES

Parmi ces mesures immédiates, la LCR se bat :

- Contre le chômage, pour l'arrêt immédiat des licenciements, pour les trente-cinq heures tout de suite, sans perte de salaires, en obligeant les patrons à embaucher.

- Contre la baisse du pouvoir d'achat, l'indexation automatique des salaires sur les prix.

- Contre le racisme et les mesures de discrimination raciale, l'égalité des droits de toutes et tous, d'où qu'ils viennent et le droit de vote pour les immigrés.

- Contre la flexibilité, le maintien et l'extension des conventions collectives et de la législation du travail protégeant collectivement les travailleurs.

Ces mesures d'urgence sont une première vague. Elles s'appuient sur la lutte unie de tous. Elles impliquent qu'on s'en prenne aux licencieurs, aux spéculateurs, aux gros bonnets amassant des fortunes au cœur même de la crise.

Le 16 mars, votez pour vous, votez pour vos revendications, vos idées. Contre les politiciens qui oublieront le lendemain votre bulletin de vote, votez LCR, votez pour les listes soutenues par elle. Votez pour vos intérêts.

Interventions d'Alain Krivine dans le cadre de la campagne à la radio et à la télévision

À la télévision, mardi 4 mars, et sur France-Inter, le 14 mars

Anne-Marie Contant - Monsieur Krivine, beaucoup de gens estiment que cette campagne est ennuyeuse. Vous aussi vous vous ennuyez ?

Alain Krivine : Oui et je crois que je ne suis pas le seul. Cinq ans après la victoire de la gauche, on aurait pu s'imaginer que la gauche et la droite allaient s'étriper avec ces élections. Il y a des problèmes très importants : le racisme, trois millions de chômeurs, et quand on se promène dans les rues, qu'est-ce qu'on voit ? Eh bien on voit une série de bobines, les têtes des candidats et en guise de programme, eh bien je peux citer un peu ce que j'ai vu, c'est du type : « La France qui avance », « Une force pour avancer », « 85 c'est fini, vive 86, c'est Chirac à Paris ». Le seul débat qui a l'air de passionner nos politiciens, c'est le débat sur la cohabitation, c'est-à-dire de savoir ce qu'ils vont faire si jamais la droite gagne les élections.

AMC - Et alors comment vous expliquez cette merveilleuse entente sur du vide politique ?

AK : Eh bien moi je crois que justement c'est lié au fait que depuis cinq ans il y a cohabitation, le fait que finalement la droite n'a rien d'autre à proposer, et c'est ça le drame, que ce qu'a fait la gauche. Elle propose simplement de le faire en pire. La fin, de l'indexation des salaires, les dizaines de milliers de licenciements, la loi aujourd'hui sur la flexibilité, l'aménagement du temps de travail, l'envoi des parachutistes au Tchad, la défense de l'école privée, la défense de la bombe atomique française, qui a quand même fait un assassinat, un écologiste qui a été tué, l'écologiste de Greenpeace, et maintenant les assassins sont considérés comme des héros.

Bref, comme l'a dit Fabius, l'autre jour à la télévision, c'était vraiment sa minute de vérité quand il a eu ce cri émouvant et qu'il a dit : « J'ai fait le sale boulot » . Eh bien effectivement, c'est ce qu'on lui reproche et malheureusement la droite risque aujourd'hui de récolter ce que la gauche a semé.

AMC - Qu'est-ce qu'il aurait fallu faire alors ?

AK : Je crois qu'en 1981 le Parti Communiste et le Parti Socialiste ont fait un choix qui est faux, c'était de faire croire qu'on pouvait faire le changement en France avec Gattaz, c'est-à-dire en respectant le lois du capitalisme qui sont bien connues, la loi du profit, la loi de la concurrence. Et dans ce carcan, ils ont été amenés à faire une politique de rigueur, une politique d'austérité, exactement la même politique que mènent tous les gouvernements de gauche ou de droite dans tous les pays d'Europe à l'heure actuelle.

AMC - Mais alors c'est pour rompre ce carcan que la Ligue Communiste Révolutionnaire se présente et soutient les listes alternatives ?

AK : Oui, nous pensons qu'aujourd'hui, devant un tel gâchis, devant une telle faillite, il faut reconstruire une véritable gauche, une gauche de combat, une gauche qui ne capitule pas. C'est pour ça qu'on soutient une vingtaine de listes alternatives à la gauche de la gauche et qu'on présente, nous la Ligue Communiste Révolutionnaire, une vingtaine de listes aussi dans d'autres départements.

AMC - C'est réaliste, vous pensez ?

AK : Très franchement, je crois qu'être anticapitaliste aujourd'hui, après tout ce qu'on a vécu, mais c'est être totalement réaliste. Parce qu'on a tout essayé en France : on a eu des gouvernements de droite dure, des gouvernements de droite molle, de droite mi-molle, on a eu un gouvernement de la gauche unie, ensuite on a eu un gouvernement de la gauche désunie et chaque fois ce sont les travailleurs qui ont été les dindons de la farce.

Voilà pourquoi nous, nous croyons que le vote pour la Ligue Communiste Révolutionnaire, c'est le vote pour l'espoir, c'est le vote pour rassembler toutes les travailleuses, tous les travailleurs de gauche qui ne veulent pas baisser les bras et qui veulent aujourd'hui construire une gauche de combat, une gauche anticapitaliste et préparer l'avenir pour en finir définitivement avec la droite.

A la télévision, vendredi 14 mars

Bernard Langlois - Philippe Brocart, un sympathisant socialiste assassiné il y a quelques jours au cours d'un collage d'affiches par un homme du Front National...

Alain Krivine, bonsoir. Pourquoi avoir choisi cette photo d'un militant qui n'était pas des vôtres, qui n'était pas membre de la Ligue, pour commencer cette émission ?

Alain Krivine : Mais j'ai voulu lui rendre hommage parce que je suis, d'une part, scandalisé parla banalisation de Le Pen et de sa bande de racistes qui a été faite pendant cette campagne électorale, scandalisé par la banalisation du crime et qui n'est pas une bavure pour nous, mais c'est l'image même de ce qu'est le fascisme : on s'attaque d'abord aux immigrés et puis maintenant aux militants de gauche ; et enfin scandalisé par l'absence totale de réactions d'ampleur nationale face à un tel crime qui risque d'être un précédent.

BL - Voilà, vous vouliez le dire en commençant. Vous l'avez dit. Votre candidature maintenant, la candidature des listes de la Ligue, c'est une question qu'on doit vous poser souvent : est-ce qu'en vous présentant à la gauche du Parti Socialiste et du Parti Communiste, vous ne risquez pas de faire le jeu de la droite ?

AK : Eh bien, écoutez, je crois que c'est la gauche qui a fait le jeu de la droite. En 1981, la droite a été battue à plates coutures, notamment avec nos voix. L'extrême-droite était quasiment inexistante. Maintenant c'est exactement l'inverse, et je crois franchement que ce n'est pas la faute de la Ligue Communiste Révolutionnaire, mais c'est le résultat d'une politique de capitulation devant la droite menée pendant cinq ans par cette gauche, et qui fait que les amis de la gauche, comme on dit, les électeurs de gauche ont été démoralisés, démobilisés, désarmés, et par contre la droite a été réarmée et a trouvé un second souffle.

BL - Vous pensez que voter utile, c'est voter pour vous ?

AK : Je crois qu'aujourd'hui voter utile ne consiste pas à se donner pour but de battre électoralement la droite, ça n'est pas le seul but, mais de battre toute politique de droite, même quand elle est menée par la gauche.

BL - Alors, c'est quoi le but de votre candidature ?

AK : Bien, le but aujourd'hui c'est de constater que cette gauche, le Parti Socialiste et le Parti Communiste, ont failli et qu'aujourd'hui la tâche essentielle c'est de changer de gauche, c'est de reconstruire une autre gauche, une gauche de combat, une gauche qui ne capitule pas, une gauche anticapitaliste. Et très franchement, je crois que des millions de gens qui ont le sentiment d'avoir été trompés, partagent tout bas ce que nous disons tout haut.

BL - Alain Krivine, j'ai l'impression et je ne suis pas le seul, que l'une des grandes leçons politiques des cinq années qu'on vient de vivre, c'est que, gouvernement de droite ou gouvernement de gauche, quand on est à la tête d'un pays comme la France et compte tenu du contexte international, la marge de manœuvre est assez étroite. Alors, apparemment vous ne partagez pas cette opinion. Est-ce que vous croyez que vous êtes réaliste ?

AK : Écoutez, je ne sais pas où est le réalisme, mais je constate qu'il y a trois millions de chômeurs en France dont la moitié ne perçoivent plus rien aujourd'hui, et au même moment le gouvernement a donné 50 milliards pour la force de frappe nucléaire, 43 milliards d'indemnisation pour les patrons des entreprises nationalisées. On nous dit qu'il y a une crise de surproduction, on produit trop, mais au même moment il faut savoir que dans le monde, il y a 850 millions de personnes qui sont sous-alimentées et qu'il y a 12 millions de personnes qui meurent de faim chaque année. Alors le réalisme, c'est véritablement de changer de société.

BL - Trente secondes pour conclure, Alain Krivine. AK : Eh bien écoutez, je crois qu'aujourd'hui, en votant pour les listes alternatives, celles qui regroupent une partie des forces à la gauche de la gauche, pas toutes encore malheureusement, ou en votant pour les listes de la Ligue Communiste Révolutionnaire, ça sera un vote pour la mobilisation, un vote pour construire enfin une véritable gauche de combat dans ce pays, un vote pour l'espoir, un vote pour le socialisme.

fs28 (article paru dans fs28i Rouge fs28i0 n°1199, 6-12 mars 1986)

Sinistre et insipide. Aucun adjectif ne convient mieux à cette campagne. Par les effets de la pub électorale, les citoyens sont appelés à se prononcer sur la couleur d'une cravate ou l'attrait d'une paire de lunettes. Aux deux bouts de l'échiquier politique, les slogans se ressemblent comme frères jumeaux : « Vivement demain », « Demain on continue » ; « Une force pour avancer », etc. A ce train, ils nous diront bientôt « Bonjour chez vous ».

Cet étrange consensus en matière de communication politique reflète au fond que les grands partis n'ergotent plus que sur des dosages ou des rythmes mais s'accordent sur l'essentiel. Plus aucun ne parle des problèmes quotidiennement rencontrés par les travailleurs. Et pour cause ! Leur seul idéal, c'est la survie du système. Leur seule morale, c'est la défense de la France du fric et des privilèges.

Il existera pourtant, le 16 mars, un moyen de manifester son dégoût d'un tel climat. Ce sera de voter peur les listes présentées ou soutenues par la LCR.

UN VOTE CONTRE LA TRAHISON

En élisant Mitterrand à la présidence de la République, en envoyant une majorité de députés de gauche à l'Assemblée nationale les salariés espéraient un changement radical de leurs conditions de vie. En échange, ils n'eurent que l'austérité. Symbole de cette dérive, le dernier cadeau de cette législature aura été la loi sur la flexibilité qui s'en prend à des conquêtes datant du Front populaire. Grâce à elle, le patronat pourra bientôt revenir sur nombre d'acquis concédés jadis dans les conventions collectives.

Faudrait-il à présent passer l'éponge ? Faudrait-il croire en la promesse d'une vie meilleure si cette gauche reste au pouvoir ? Certainement pas. Aujourd'hui autant qu'hier, les gouvernants demandent un chèque en blanc. D'ailleurs, ils fixent eux-mêmes à 30 % des suffrages la limite de leurs ambitions. Comme cela ne suffira pas pour former une majorité, Mitterrand aura toute latitude pour utiliser ce score pour négocier sa cohabitation avec un éventuel gouvernement de droite. Les électeurs socialistes seront encore une fois réduits au rôle de masse de manœuvre au service d'un projet dont toutes les clés leur échappent. Il n'est donc qu'une réponse à opposer aux exhortations de l'équipe au pouvoir : « On a déjà donné ! »

UN VOTE CONTRE LA REVANCHE

Mitterrand, Fabius et Jospin appellent à faire barrage à la droite. Il est vrai que cette dernière entend prendre sa revanche. Ses propositions remettent pêle-mêle en cause les droits des salariés, les libertés syndicales, la protection sociale, Et dans ses bagages, se trouve un Le Pen qui rêve d'une France nettoyée des « étrangers » et de ceux qui ne pensent pas comme lui.

Mais qui est responsable de l'arrogance des battus de mai 1981 ? Au premier chef, ceux qui ont semé le désarroi dans le monde du travail en reniant tous leurs engagements. Il suffit pour s'en convaincre de voir les leaders de la réaction légitimer leur démagogie en mettant en évidence le bilan du gouvernement. Ainsi, pour justifier la suppression de l'autorisation administrative de licenciement, Chirac fait-il benoîtement remarquer : « Aujourd'hui, l'information qui émane du ministère du Travail fait apparaître que la quasi-totalité des demandes de licenciement sont accordées. »

Pour s'opposer réellement au retour de la droite, il faut refonder l'espoir. Il faut offrir aux travailleurs une véritable alternative politique, un projet s'opposant sur tous les plans à la société de l'exploitation et de l'inégalité. A l'évidence, ce n'est pas des allées du pouvoir que viendra pareille perspective.

UN VOTE POUR UNE GAUCHE INFLEXIBLE

« La gauche, la droite, ces notions sont quelque peu dépassées », expliquait récemment le chef de l'État. La lutte des classes est cependant plus actuelle que jamais. Pour restaurer leurs profits, les capitalistes n'ont pour seule politique que l'austérité la plus brutale, l'attaque contre les grandes conquêtes sociales. A l'inverse, les travailleurs n'ont d'autre choix que la résistance pied à pied, la défense des acquis et des revendications.

Après trois ans de présence au gouvernement, le PCF fait mine de tenir un langage similaire. Pourtant, comment accorder une quelconque confiance à ses dirigeants ? Ils n'ont cessé de faire et de défaire leur alliance avec les socialistes. Et ils en reviennent maintenant à la perspective d'une Union de la gauche « rééquilibrée ». Pour quoi faire ? Ils n'en soufflent mot. En cinq ans, leur appareil, leurs députés, leur formidable potentiel militant ne furent d'aucune utilité à la population laborieuse. Quelques députés supplémentaires suffiraient-ils à y changer quoi que ce soit ?

UN VOTE POUR LE SOCIALISME

« Il n'est d'autre politique possible que celle qui s'applique depuis le 10 mai », nous répètent à l'envie ministres et représentants de la rue de Solférino. Rien n'est plus faux. Confronté à la crise, le capitalisme ne peut plus faire illusion. Parce qu'il oppose la toute puissance de quelques-uns aux besoins du plus grand nombre, il se montre incapable de fonctionner dans le sens du progrès social. Dès lors, respecter ses règles ne peut déboucher que sur l'aggravation de la situation des plus démunis. Pour avoir fait comme ses prédécesseurs, l'actuel gouvernement a laissé les patrons licencier et le chômage se développer. Ce qui plonge des millions d'hommes et de femmes dans la détresse et le dénuement.

Il n'existe d'autre solution réaliste que la rupture avec les lois du marché. Si l'on s'en prend au partage des richesses, si l'on fait payer les grandes fortunes, si l'on fait confiance à l'intelligence créatrice du peuple travailleur, la crise peut être vaincue. Les exemples que nous développons dans les pages 2, 3 et 4 ne sont-ils pas éloquents ? Loin d'être archaïque, le socialisme demeure bien l'idée la plus moderne de cette fin de siècle. A nous de savoir maintenant la faire revivre. Car c'est là qu'est le chemin de l'avenir.

UN VOTE POUR L'AVENIR

Dans quelques jours, il ne s'agira pas seulement de témoigner, d'être fidèle aux valeurs émancipatrices du mouvement ouvrier. Plus nombreux seront les suffrages qui se porteront à la gauche de la gauche, plus ils influeront sur l'après-16 mars. Ils exprimeront en effet que des dizaines de milliers d'électeurs ont su tirer la leçon de l'expérience qui s'achève et qu'ils sont bien décidés à faire entendre demain les exigences ouvrières par la lutte. Ce n'est pas l'un des moindres enjeux du prochain scrutin face aux assauts que préparent la droite et le patronat.

Le vote du 16 mars peut également constituer un atout pour l'émergence d'une nouvelle force dans le pays. Une force qui place l'intérêt des travailleurs au-dessus de toute autre considération. Cet objectif, notre organisation le concrétise depuis des mois, en œuvrant au regroupement des courants et des militants à la recherche d'une alternative politique. Elle a, en particulier, fait tout ce qui était en son pouvoir pour empêcher l'éparpillement des candidatures à gauche de la gauche. Hélas, le poids du passé, les pesanteurs de la situation politique, les méfiances et les sectarismes entre organisations ont empêché que cette bataille aboutisse. Néanmoins, dans une vingtaine de départements, se sont formées des listes de large convergence, sur des bases clairement anticapitalistes. Sans la moindre réserve, la LCR les soutient ou y participe.

Dans vingt autres départements, nous avons dû nous présenter sous notre seul drapeau. A la différence des politiciens qui encombrent les écrans, nos candidats se battent quotidiennement dans les entreprises et les localités, pour une vie plus libre et plus juste. Voter en leur faveur, ce sera donc affirmer qu'on peut être de gauche sans se faire complice d'une gauche faillie et combattre la politique des gouvernants sans faire le jeu de la droite. Ce sera soutenir leurs efforts de rassemblement de toutes les énergies disponibles.

Alors, plus d'hésitation ! Un seul jour, un seul tour, certes. Mais un seul vote utile : le vote rouge, le vote à gauche de la gauche.

Christian Picquef

Editorial des feuilles d'entreprise (semaine du 6 au 12 mars)

16 mars, votez LCR !

Avant le 16 mars, le combat entre la droite et la gauche devrait être acharné. Eh bien non, ils s'acharnent à parler cohabitation, c'est-à-dire comment la gauche présidentielle et la droite parlementaire vont gouverner ensemble. On a beau leur dire, à tous ces politiciens, que ce qui nous intéresse, c'est la manière de vaincre le chômage, eux nous parlent de leurs sièges au Parlement.

Ils ne peuvent même pas nous promettre que demain ils raseront gratis, ils nous rasent déjà.

ALORS LE 16 MARS, VOTEZ POUR VOS INTÉRÊTS

S'en remettre aux politiciens habituels, franchement, ce n'est pas réaliste. Une fois les élections passées, tout le monde le sait, ils prennent leurs habitudes au Parlement, et l'électeur, ce « cochon de votant », sera oublié... jusqu'au prochain scrutin.

Alors, ce cirque électoral, merci bien. Tout n'est qu'hypocrisie. Car si la campagne électorale est ennuyeuse, c'est que sur le fond la droite libérale et la gauche socialiste sont d'accord : la cohabitation est possible parce que toutes deux s'entendent à faire payer la crise aux travailleurs. Ce que la gauche a fait, la droite veut le continuer, en pire.

Pourtant, le PS nous dit : « Pour battre la droite, votez Mitterrand. » Nous , on a déjà donné ! Le 10 mai 1981, nous avons tout fait pour battre la droite. La gauche a tout eu entre les mains, comme jamais dans son histoire : le président, le Parlement, le gouvernement. Qu'en a-t-elle fait ? Une politique d'austérité qui ramène sûrement la droite au pouvoir. Et il faudrait recommencer ? Il faudrait croire la fable du PS qui dit que voter pour la majorité « de progrès » derrière Mitterrand, c'est un moyen de battre la droite ? Mais précisément, Mitterrand s'apprête à gouverner avec la droite. Pas question de passer l'éponge sur cinq ans de trahisons en faisant semblant de croire que, finalement, cette gauche qui nous a trahis, c'est toujours mieux que la droite.

LE 16 MARS, VOTEZ RÉVOLUTIONNAIRE

Non, mille fois non ! Le choix du 16 mars n'est pas entre le pire, la droite et Le Pen, et le moins pire, la gauche. Le 16 mars, il n'y a qu'un tour. Ce n'est pas un deuxième tour, comme avant, c'est un tour unique où l'on doit voter pour ce qu'on pense, ce qu'on défend'tous les jours, ses intérêts, sans se prêter aux calculs politiciens qui se retournent toujours contre les travailleurs...

Sortir du dilemme, comment voter contre la droite sans cautionner l'austérité de gauche, le 16 mars c'est possible en votant LCR. Le vote LCR, c'est refuser l'austérité et le chômage, d'où qu'ils viennent. Le vote LCR, c'est dire en même temps que les intérêts des travailleurs sont une chose trop sérieuse pour les confier à cette gauche, PS et PCF, responsable du gâchis du 10 mai. Le vote LCR, c'est se prononcer pour unir, rassembler celles et ceux qui ne baissent pas les bras devant la crise et le chômage, et qui veulent construire ensemble une force unitaire anticapitaliste, une vraie et nouvelle gauche par et pour les travailleurs.

Alors, le 16 mars, votez LCR. Votez pour les listes qu'elle soutient.

Quelques exemples de textes de présentation des listes « alternatives »

Alternative 86 Paris, extraits du double tract LCR

Le 16 mars, votez utile, votez Alternative 86 Paris ALBERT JACQUARD, ANTOINE COMTE TÈTES DE LISTE ALTERNATIVE 86 PARIS

Interview

- Albert Jacquard, Antoine Comte, quel est le sens de votre présence à la tête des listes « Alternative 86 Paris » ?

A. Jacquard : En tant que biologiste, que généticien, j'ai été amené à réfléchir au regard que nous devrions porter sur chaque homme et sur l'organisation de la société. Lorsque j'ai lu le programme d' « Alternative 86 », j'y ai trouvé évoqués les sujets qui sont pour moi prioritaires. Or ces sujets sont totalement occultés par les propagandes des partis et par les médias. Je suis scandalisé par le mépris pour le citoyen que révèle la prolifération des affiches montrant les candidats dans des poses avantageuses, le matraquage par des slogans aussi creux que « Vivement demain » ou « Une France d'avance ». C'est parce que je crois possible une réelle démocratie que je participe à l'effort d » `Alternative 86 Paris ».

A. Comte : Effectivement c'est la première fois que j'éprouve le besoin de participer à une élection, autrement qu'en électeur.

Je me satisfaisais jusqu'ici d'activités professionnelles engagées, qui me donnaient largement l'occasion d'intervenir publiquement sur des questions cruciales (libertés individuelles et collectives ; droits des peuples ; en un mot, droits contre raison d'État.)

Mais depuis quelques années, le débat politique s'est tellement appauvri en même temps qu'il s'est considérablement crispé, qu'il me paraît essentiel de participer à une initiative qui veut poser les problèmes fondamentaux auxquels notre société est et sera confrontée. D'autant que la bipolarisation croissante entraîne un silence complice précisément sur ces questions.

Mais je dois dire qu'il y a une autre raison : j'ai toujours cru qu'une démarche large, unitaire, résultat de débats menés loyalement, était la seule qui dans la période actuelle avait quelque chance de déclencher une dynamique permettant de dépasser l'alternance conservatisme-réformisme. La liste « Alternative 86 » porte cet espoir : je me dois de lui apporter plus qu'un soutien extérieur.

- Vous n'ignorez pas que la pression pour le « vote utile » sera importante à ces élections. Etes-vous utiles ?

A. Jacquard : Mais utile à quoi ?

Il se trouve, je l'ai dit, que je crois en la démocratie. Pour moi, les élections sont avant tout une occasion d'informer les citoyens, de les faire réfléchir en commun, avant de leur demander une délégation de pouvoir. Or la plupart des partis nous demande une délégation, sans proposer de réflexion, en nous abrutissant de propagande, en nous submergeant d'événements dérisoires, et en passant sous silence les questions essentielles. Est-il sérieux de consacrer tant d'articles dans les journaux au rendez-vous manqué de trois candidats à Clermont-Ferrand et aucun aux problèmes difficiles posés par la force de frappe ? Ce qui est non seulement utile mais nécessaire c'est d'appeler nos concitoyens à regarder la réalité en face. Le vote pour « Alternative 86 » est ainsi infiniment « utile ». A. Comte : Je trouve pour ma part invraisemblable que ce soit les mêmes qui aient approuvé le nouveau mode de scrutin et qui appellent au « vote utile ».

Car tout de même ce nouveau mode de scrutin n'est pas du tout égalitaire, comme le serait la proportionnelle intégrale et, en l'espèce, par son système de répartition aux plus forts restes, il va favoriser Le Pen.

Avancer dans ces conditions le slogan « Votez utile » pour les électeurs de gauche, c'est interdire une expression plurielle à gauche en même temps qu'on assure l'extrême-droite d'une représentation probablement dans le but de gêner la droite traditionnelle...

C'est un calcul politicard lamentable dont je ne serai jamais partie prenante.

Et puis soyons claire : un argument du genre « ravalez vos critiques sans quoi vous servez l'ennemi » me rappelle de fâcheux précédents !

La démocratie a décidément encore des progrès à faire : c'est aussi cette question que nous aborderons avec la liste « Alternative 86 ».

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