A l'occasion de son congrès : la CFDT confirme son recentrage08/04/19791979Lutte de Classe/medias/mensuelnumero/images/1979/04/63.jpg.484x700_q85_box-27%2C0%2C2451%2C3504_crop_detail.jpg

A l'occasion de son congrès : la CFDT confirme son recentrage

Le congrès de la CFDT, qui se tiendra des 8 au 12 mai prochains, ne fera probablement que confirmer la politique dite de « recentrage » opéré il y a un an, après la défaite électorale de la gauche.

En avril dernier, un Conseil national de la CFDT définissait ainsi cette politique : « Pour progresser, il nous faut plus que jamais refuser de subordonner notre action à une prétendue priorité donnée en permanence au changement politique ou électoral. Il nous faut refuser la globalisation systématique des problèmes, la réduction de la richesse des thèmes revendicatifs à quelques slogans nationaux. Laisser entendre par exemple que « le programme commun réglera tous vos problèmes » ne peut qu'entretenir la passivité et confine à l'aliénation politique. Pour que l'action collective réponde à la vie concrète des gens, les décisions doivent être ressenties par les intéressés comme étant les leurs. Elles doivent être prises au plus près d'eux, porter des objectifs qu'ils partagent bien. L'action prend sa source dans l'atelier, le service, l'établissement. C'est par le débat démocratique, par la confrontation, que la capacité d'action doit ensuite se porter aux autres niveaux, branche, région, plan national et international ... »

Le « recentrage » de la CFDT - que certains responsables résument en parlant de l'abandon de la « logique politique » pour revenir à la « logique syndicale » - c'est la révision d'un certain nombre de choix tactiques qui faisaient qu'à l'approche des élections de 1978, la CFDT avait :

- d'une part à s'affirmer comme une des composantes des forces de l'Union de la gauche

- d'autre part, sur le plan syndical, à mener une politique d'unité d'action quasi systématique avec la CGT

Ces choix tactiques tranchaient, il faut le dire, sur la traditionnelle distance vis-à-vis des partis politiques que la CFDT avait toujours conservée jusque-là.

Certes, en 1956, la CFTC (Confédération Française des Travailleurs Chrétiens, d'où la CFDT est issue, en tant que tendance majoritaire en 1964, après la décision de « déconfessionnalisation » et abandon du sigle « chrétien » ), s'était prononcée prudemment en faveur du Front Républicain. Un peu plus tard, en 1965, la CFDT avait soutenu l'opération Defferre, la tentative avortée du maire de Marseille de se porter candidat à la présidence de la République comme chef de file d'une « troisième force », d'un regroupement des forces politiques de gauche hostiles au Parti Communiste. En 1969, encore, pour le second tour de l'élection présidentielle, la CFDT avait affirmé sa préférence pour le candidat Poher.

Mais à coup sûr, ces diverses prises de position de l'appareil de la CFDT dans le passé n'allaient pas aussi loin que le choix fait en mai 1974 de soutenir le candidat commun de la gauche, Mitterrand.

Elles ne l'engageaient pas de la même façon parce que ni Defferre, ni Poher n'avaient autant de chances présumées d'accéder au gouvernement que Mitterrand. Là, en 1974 et jusqu'à 1978, parce que la CFDT considérait le tiercé Mitterrand-Marchais-Fabre gagnant, elle misa sur lui toutes ses cartes.

La CFDT escomptait obtenir du futur gouvernement de gauche des possibilités de discussions, de négociations, une place et une considération pour son propre appareil que ne lui offrait pas, dans l'immédiat, le gouvernement de droite en place.

Bien sûr, si l'engagement du côté de l'Union de la gauche, et plus particulièrement derrière le Parti Socialiste, semblait offrir à l'appareil de la CFDT un certain nombre d'avantages pour l'avenir, il présentait une contrepartie un peu contraignante pour le présent : l'alliance plus étroite avec la CGT, que la CFDT ne pouvait pas repousser à partir du moment où les deux confédérations, bien que rivales, devenaient toutes deux composantes du même camp de la gauche.

Certes, l'unité d'action entre la CGT et la CFDT, même à partir de 1974, resta ce qu'elle avait toujours été, c'est-à-dire « conflictuelle ». Mais à s'aligner plus que de coutume, par la force des circonstances politiques, sur un appareil syndical autrement puissant et dynamique que le sien, la CFDT prenait le risque de perdre une partie de son influence et, surtout, celui d'apparaître comme un syndicat trop lié à la CGT.

Cela dit, si Edmond Maire a choisi de se ranger dans le camp des forces de l'Union de la gauche c'est en mesurant et les avantages de l'opération - une meilleure place pour la CFDT si la gauche était victorieuse, ce que tout le monde considérait comme déjà acquis - et ses inconvénients, entre autres celui que sa centrale résiste avec difficulté à la pression de sa solide concurrente, la CGT

Cela dit, tous les petits et grands calculs auxquels la CFDT a pu se livrer pour lier son sort à l'Union de la gauche se sont révélés bien évidemment périmés le soir du 19 mars, avec la défaite électorale de la gauche.

Les comptes étaient donc à reprendre. Le « tir à réviser », comme l'affirma le responsable confédéral Albert Mercier. Il fallait tenir compte de la nouvelle donne, issue des urnes.

Le revirement de la CFDT fut aussi rapide que spectaculaire. Dès le 21 mars, un bureau extraordinaire de la centrale syndicale décidait que dans la période passée, on avait fait trop de politique et trop contribué à faire croire aux travailleurs que les bulletins de vote pourraient changer leur sort ; il fallait donc revenir au travail syndical de base, à l'atelier, au bureau, dans les cités, et se garder aussi de liens trop étroits avec la CGT qui, liée avec le Parti Communiste, avait de tout autres raisons de politiser les actions. Et pour mieux concrétiser le « recentrage », les dirigeants de la CFDT s'invitèrent aussitôt chez Giscard...

S'ils furent les premiers, ils ne furent pas les seuls et dans la période qui suivit le second tour des législatives, tous les dirigeants des confédérations syndicales furent successivement reçus chez Giscard, Barre et Ceyrac.

Ce geste s'est révélé être, de la part de la CFDT, le début d'une réorientation tactique à laquelle la centrale de Maire se tient encore aujourd'hui, même si « l'ouverture sociale » prônée par le gouvernement n'a guère eu de suite.

Contrairement à séguy qui dirige une c.g.t. très marquée à la fois socialement par son poids dans la classe ouvrière et surtout politiquement par ses liens avec le parti communiste - ce qui limite ses possibilités de pactiser avec patrons ou gouvernants de droite mais limite surtout la volonté de ces derniers de le faire - maire, lui, à la tête de l'appareil de la c.f.d.t., une centrale réformiste classique et bien moins ancrée dans la classe ouvrière, peut se permettre des oscillations tactiques d'une plus grande rapidité et d'une plus grande ampleur.

Les dirigeants de la C.F.D.T qui parlent depuis quelques mois d'un « recentrage », pèsent leur mot. Ils affirment justement que la CFDT se situe au « centre », ni à droite mais ni à gauche non plus ; qu'elle peut même naviguer avec une certaine liberté autour de ce centre et que si elle s'apprêtait avant mars 1978 à négocier et éventuellement pactiser avec un gouvernement de gauche - circonstances politiques obligeant - elle peut aisément se recycler dans les mêmes négociations avec un gouvernement de droite. De toutes façons, ce ne sont pas ses traditions passées qui y font obstacle.

Contrairement à la CGT, liée avant la guerre à la SFIO, puis après la guerre au Parti Communiste, la CFDT n'a jamais eu le coeur spécialement à gauche. La CFTC dont elle est issue élevait même son âme à Dieu. C'est au travers de cet appareil syndical que la hiérarchie catholique tentait de défendre ses positions socialement réactionnaires dans le monde du travail. Dans l'ouvrage publié en 1975 qu'il a consacré à la CFDT, Edmond Maire se flatte encore aujourd'hui de ce passé et de ce « confluent de traditions » qui a donné le jour à la CFDT A coup sûr, la naissance de la CFDT, en 1964, par le simple abandon par la majorité de l'ancienne CFTC du sigle « chrétien » n'a pas entraîné de transformation fondamentale. De la confédération confessionnelle qu'elle était, la CFDT est devenue une plus grande confédération affichant un réformisme « à l'américaine ». Ses dirigeants affirmaient vouloir un syndicalisme « constructif », « présent » à tous les niveaux de gestion de l'appareil d'État bourgeois, un syndicalisme sur lequel l'État, « arbitre entre les classes », pourrait s'appuyer pour réaliser la « justice sociale » en recherchant un équilibre « raisonnable » entre les intérêts en présence.

Si les dirigeants de la CFDT, en mai 68 en particulier, ont pu se laisser momentanément aller à une certaine surenchère verbale gauchisante ; s'ils se sont différenciés alors de la CGT vis-à-vis des étudiants, et si bon nombre de jeunes combatifs ont afflué vers eux par réaction contre l'attitude antidémocratique de la CGT dans la grève, cela ne modifiait en aucune façon la nature profondément réformiste et collaborationniste de l'appareil syndical CFDT Au sommet de la confédération, Eugène Descamps - un des dirigeants de l'ancienne CFTC - agissait au même moment exactement comme Séguy vis-à-vis du gouvernement et du patronat. Et la CFDT a entériné les accords de Grenelle tout comme la CGT.

A bien d'autres reprises, encore, la CFDT a pleinement joué le jeu de la concertation avec les gouvernements de droite, quand ceux-ci voulaient bien s'y prêter.

L'accord le plus spectaculaire en la matière fut certainement le fameux « contrat de progrès » de l'E.G.F., signé en décembre 1969 par la C.G.C., la CFTC, FO et la CFDT d'une part, la direction de l'E.G.F., de l'autre, sous les auspices du gouvernement Chaban. Seule la CGT - pour un temps seulement, il est vrai - se refusa à cette signature. L'opération tout entière était d'ailleurs une machination contre elle. Et hormis le fait que la CFDT se livrait de bon gré au jeu d'accréditer la « nouvelle société » que voulait instaurer Chaban, elle signait un accord, dit de « convention sociale » qui, d'une part, liait les augmentations de salaires à la productivité de la branche, mais qui par ailleurs limitait le droit de grève en instituant désormais un préavis de... trois mois avant toute action.

Toujours dans son même ouvrage, La CFDT d'aujourd'hui, Edmond Maire expose très lucidement le sens exact et la portée, pour le gouvernement Chaban, de ce fameux « contrat de progrès ». Il écrit : « Ainsi, la politique contractuelle instaurée par le gouvernement Chaban-Delmas, notamment dans le secteur public et nationalisé, visait un triple objectif :

- obtenir que les organisations syndicales s'engagent pour une période au cours de laquelle l'accord ne pourrait être dénoncé ;

- lier l'évolution des salaires à la productivité des entreprises, ce qui était une façon habile d'intégrer les travailleurs au système industriel ;

- étaler le plus possible les accords sur de longues périodes afin de permettre aux entreprises d'établir des plans à long terme qui n'auraient pas à être révisés.

La C.F.D.t. exigeait depuis longtemps que dans le secteur public et nationalisé, la négociation avec chacune des directions, se substitue à la décision unilatérale et centralisée du gouvernement. mais elle ne pouvait accepter les modalités de la politique contractuelle qui lui était proposée. en même temps, elle refusait les arrière-pensées du gouvernement qui entendait se servir de tous les moyens d'information à sa disposition pour donner à un contrat éventuel - celui intervenu à l'e.g.f. par exemple - la signification d'un accord profond entre les travailleurs et le pouvoir... ensuite, la confédération ne pouvait accepter la liaison proposée entre les salaires et la productivité, car une telle conception subordonne passivement la progression des salaires à la marche de l'économie et donc à des décisions gouvernementales et patronales qui échappent aux travailleurs...

Enfin, cette politique reposait sur la pratique de négociations limitées au sommet... laissant sans solution ni lieux de négociations appropriés tous les problèmes soulevés dans l'action syndicale quotidienne... En fin de compte, la CFDT voyait dans la politique contractuelle proposée par le gouvernement Chaban-Delmas le danger de déposséder de leur capacité de décision et d'autodétermination les travailleurs aussi bien que les sections d'entreprise. Elle refusait absolument qu'un contrat lie les syndicats et les employeurs comme c'est le cas dans les pays où la grève est illégale pendant la durée d'un accord, et le syndicat paralysé par sa signature »...

La seule chose qu'Edmond Maire omet de signaler explicitement, c'est que la CFDT a signé alors ledit accord... Peut-être la CFDT de 1975, - année de publication de l'ouvrage - engagée dans le camp des forces de l'Union de la gauche, préférait-elle travestir quelque peu la vérité ?

Mais ce n'est là finalement qu'une illustration de la grande variété des choix tactiques que l'appareil de la CFDT a pu faire dans le passé, et qu'il peut faire encore dans l'avenir, tant dans ses attitudes vis-à-vis des gouvernements et du patronat, que dans ses rapports et liens avec les partis politiques de gauche et les autres appareils syndicaux.

Aujourd'hui, donc, la CFDT se « recentre ». C'est-à-dire qu'elle se recycle dans un certain apolitisme. Certes, dans un apolitisme de façade, dans cette attitude « d'indépendance du mouvement syndical par rapport aux partis politiques » qu'ont toujours prônée les dirigeants réformistes en tous genres - de Léon Jouhaux à André Bergeron, en passant par Eugène Descamps et Edmond Maire - pour mieux mener leur politique de collaboration de classe avec le patronat, les gouvernements en place, quelle que soit leur couleur politique.

Cela dit, aujourd'hui, l'accent mis sur la nécessité de « reconstruire l'action syndicale » qui sera le thème majeur du prochain congrès, signifie un petit changement d'attitude à l'égard des partis de la gauche, une distanciation à leur égard.

L'anti-communisme a toujours été un des fondements de la politique des dirigeants de la CFDT Si pendant quelques années - Union de la gauche obligeait - les rapports entre la CFDT et le PCF ont été un peu plus fréquents et courtois, Maire en est revenu à des attaques plus ouvertes contre un parti qui les lui rend bien. Le dirigeant de la CFDT a donné le ton dès mars-avril 1978, dès l'échec électoral en dénonçant alors le PCF comme le parti qui avait « cassé la dynamique unitaire » et « assassiné l'espérance ».

Vis-à-vis du Parti Socialiste, l'attitude de Maire est bien sûr tout autre. C'est toujours vers le Parti Socialiste, du moins vers l'une ou l'autre de ses tendances, que vont les sympathies et des dirigeants de la CFDT et de la plupart des travailleurs dont elle a la confiance. Dans les textes soumis à son prochain congrès, la CFDT réaffirme au passage sa volonté de contribuer à faire « mûrir l'alternative politique de gauche » . Et quand les dirigeants de la CFDT disent cela, ce n'est bien sûr pas au renforcement du Parti Communiste qu'ils comptent contribuer, mais à celui du Parti Socialiste.

Cela dit, même à l'égard du Parti Socialiste, la CFDT conserve quelque distance. Elle se défend d'être dans le mouvement syndical la « courroie de transmission » d'une force politique quelconque, contrairement à la CGT qui serait celle du Parti Communiste. La CFDT est un appareil syndical jaloux de son existence et de ses prérogatives propres et qui tient à les sauvegarder même par rapport à un Parti Socialiste dont elle partage pourtant certains choix fondamentaux. Et de son côté, le Parti Socialiste tient aussi a ne pas être lié de façon privilégiée à l'appareil syndical de la CFDT, ne serait-ce que pour pouvoir se dire aussi lié à la CGT, et il se démarque donc à l'occasion de la première.

Sur le plan strictement syndical, le « recentrage » de la CFDT signifie aussi un changement tactique par rapport à la CGT Edmond Maire ne renie en aucune façon, par principe, l'unité d'action avec la confédération de Séguy, ni celle avec les autres centrales syndicales, bien sûr. Mais les événements de ces derniers mois l'ont prouvé - a deux reprises, le 21 décembre 1978 et le 23 mars dernier, la CGT a appelé seule à des journées nationales d'action - , la CFDT ne recherche pas à afficher dans les faits des rapports étroits et privilégiés avec la CGT

Ces derniers mois, pour justifier son refus de s'associer aux journées nationales d'action de la CGT, la CFDT a bien sûr invoqué l'intérêt des travailleurs. Comme à bien d'autres occasions dans le passé, elle a dénoncé ces manifestations nationales comme des journées sans lendemain, des « grandes messes syndicales » sans perspectives, des mobilisations politiques que la CGT déciderait dans l'intérêt supérieur du Parti Communiste.

En réalité, la CFDT ne défend pas plus les intérêts fondamentaux des travailleurs en se refusant à être partie prenante de journées nationales d'action que la CGT ne le fait en les organisant. Et quand bien même ces journées furent en effet sans lendemain, les travailleurs les plus conscients et les plus combatifs qui y participaient eurent raison de le faire et de profiter ainsi de l'occasion qui leur était offerte d'exprimer leur mécontentement.

D'ailleurs, la même CFDT qui dénonce aujourd'hui dans sa presse les « journées nationales », toutes les actions « globalisantes » sous le prétexte qu'elles ne correspondraient pas au niveau général de conscience de la classe ouvrière, ne s'interdit pas pour autant d'organiser ses propres manifestations nationales. La semaine du 2 au 7 avril était semaine nationale d'actions et de manifestations de la CFDT sur le problème de la réduction du temps de travail. Aux journées sans lendemain de la CGT, la CFDT ne fait au mieux qu'ajouter ses semaines sans lendemain... Et si la vraie raison de la non-participation de la CFDT à la journée du 23 mars était l'absence d'objectifs fixés à cette manifestation - comme l'ont dit et écrit les dirigeants de la CFDT - pourquoi n'ont-ils pas pesé de tout leur poids pour donner à cette journée le sens d'un mouvement général et national pour les 35 heures ?

En fait, comme toujours dans le passé, la CFDT ne détermine pas son attitude unitaire ou non par rapport à la CGT - pas plus que la CGT par rapport à la CFDT d'ailleurs - en fonction des intérêts généraux des travailleurs, mais en fonction de ses seuls intérêts d'appareil. Aujourd'hui, après plusieurs années où la C.F.D.T a été contrainte pour des raisons politiques d'apparaître plus ou moins à la remorque de la CGT, la confédération dirigée par Maire a besoin de réaffirmer sa « spécificité », son « authenticité », face à une CGT dont elle est fondamentalement rivale et concurrente. C'est en termes d'ailleurs à peine voilés que toutes les résolutions et déclarations des conseils nationaux de la CFDT affirment depuis plusieurs mois cette nécessité pour la centrale syndicale de se refaire, de se renforcer, au détriment - si elle le peut, bien sûr - de la CGT

A la faveur de ce « recentrage », de ses réorientations tactiques, la CFDT réussira-t-elle dans la période qui vient à accroître son audience ? C'est le problème de Maire et des dirigeants de la CFDT Mais à coup sûr, si cette politique portait quelques fruits, les intérêts de la classe ouvrière n'y trouveraient pas leur compte.

Le 15 mars dernier, on pouvait lire dans l'éditorial de Syndicalisme Hebdo, sous la plume de Michel Rolant : « Le PCF, des groupes d'extrême-gauche, certaines organisations de la CGT, préconisent, une fois de plus, le « tous ensemble », les manifestations de protestation, la pression politique. Les quatre années passées nous montrent où cela conduit : manifestations militantes, globalisation des problèmes, attentisme électoral et mise en cause de l'autonomie syndicale. La CFDT s'oppose à cette conception simpliste et manipulatrice des problèmes... » .

En dénonçant ainsi la politisation des mouvements, leur « globalisation » (pour reprendre le jargon en usage square Montholon) comme une « dérive à l'action syndicale), - la CFDT parle même par ailleurs de la nécessité de « lutter au pays) - , la CFDT milite contre la prise de conscience, par les travailleurs, que leurs intérêts sont généraux, et que c'est bel et bien à une lutte d'ensemble qu'ils doivent aujourd'hui se préparer. C'est pourtant cette conviction simple - et non pas simpliste comme la juge Maire - qui doit faire son chemin, si la classe ouvrière ne veut pas faire les frais de la crise.

Cela dit, le « recentrage » de la C. F. D.T. a au moins le mérite de faire clairement réapparaître la confédération de Maire pour ce qu'elle n'a jamais cessé d'être : une centrale syndicale réformiste, foncièrement collaborationniste et anti-communiste. Une centrale syndicale qui, si elle se situe au centre de quelque chose, ne se situe certainement pas aujourd'hui, au centre des intérêts généraux des travailleurs. tab

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